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20 mars 2007

After The Wedding



Non, le cinéma danois ne se résume pas à Lars Von Trier. Il y a une pépite qui s'appelle Anders Thomas Jensen, un des réalisateurs-scénaristes les plus originaux d'Europe (Les Bouchers Verts, Adam's Apples). Comme par hasard, ce réalisateur travaille beaucoup avec l'extraordinaire acteur Mads Mikkelsen, enfin révélé à un public plus large depuis sa prestation jouissive dans Casino Royale.

C'est bien la présence en tête d'affiche de Mikkelsen qui m'a incité à aller voir After The Wedding. J'aurais dû alors voir plus tôt qu'After The Wedding était co-écrit par Anders-Thomas Jensen ! Tout se tient : le cinéma danois possède un trio gagnant, et je n'en connaissais pas le troisième maillon. C'est désormais chose faite : avec The Wedding, la réalisatrice Susanne Bier est désormais en haut de la liste des réalisateurs dont il faut que je découvre toute la filmographie.

On reconnaît la patte de Jensen dans le scénario par cette capacité à tenir le spectateur en haleine, en déplaçant constamment le noeud de l'intrigue, et en l'emmenant sur un terrain qui n'est jamais celui qui paraît être (en conséquence de quoi, rien ne sera écrit ici sur l'histoire du film). Et pourtant, nous n'avons pas affaire ici à un thriller, mais bel et bien à un drame, rugueux et intense. Tension et absence de pathos : impossible de quitter les yeux de l'écran pendant deux heures. Mine de rien, c'est devenu assez rare de trouver de tels scénarios sans boursouflures.

Mais la grande surprise, au-delà de cette superbe démonstration d'écriture, c'est la réalisation. Susanne Bier filme beaucoup caméra à l'épaule, passant littéralement au scalpel des performances d'acteurs viscérales. Ses cadrages sont virtuoses et nous transportent au coeur de l'émotion et de l'atmosphère des scènes. Mieux, elle sait capter mille détails qui mettent le récit en état d'apesanteur pour quelques secondes, comme sait si bien le faire l'immense Michael Mann.

On pourra tout juste reprocher que le film, dans son dernier tiers, se laisse aller à un ou deux rebondissements un tout petit peu prévisibles. A part ça, c'est une oeuvre de haute volée, et sans conteste ma plus belle découverte depuis le début de l'année.

8/10

09:36 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma

10 mars 2007

Je crois que je l'aime



De temps à autre, le cinéma français nous offre de véritables perles dans le genre de la comédie. Je crois que je l'aime fait partie de cette espèce hélas trop rare. Pierre Jolivet (oui, le frère de Marc), réalisateur et coscénariste, est loin d'être un débutant (Strictement personnel, Ma petite entreprise, Zim and co...), mais il reste assez inattendu que son film flirte avec un tel niveau de finesse.

Le scénario est archi convenu (un homme et une femme que tout sépare finiront ensemble), mais une comédie est affaire de rythme et de dialogues. Ici, la mise en scène relève de la mécanique quantique ! Chaque plan est parfaitement millimétré, les dialogues sont parfaitement rythmés et la direction d'acteurs est totalement maîtrisée. Le couple principal fonctionne au mieux, ce qui n'était pas gagné entre des pedigrees aussi différents que ceux de Vincent Lindon et Sandrine Bonnaire (dont c'est la toute première comédie de sa carrière !). Les seconds rôles, tenus par des François Berléand et Kad Merad au sommet de leur forme, sont jouissifs et achèvent d'emporter une victoire totale : sous ses aspects inoffensifs, Je crois que je l'aime est un pur bijou qui rappelle qu'il est ô combien possible de divertir... avec intelligence. Irrésistible, et rare.

8/10

20:30 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

27 février 2007

Letters from Iwo Jima



Comme je l'écrivais à la fin de ma note sur Flag Of Our Fathers, après la relative déception suscitée par ce dernier, j'attendais beaucoup du point de vue japonais de la bataille d'Iwo Jima. Trop, sans doute.

Pourtant, ce deuxième volet ne souffre pas des mêmes écueils. L'histoire est ici quasiment linéaire, et presque... trop. Les Américains, dans le premier volet, avaient droit à de nombreux flashes-back ; les soldats japonais que nous suivons n'existent que pendant le cours de la bataille, en dehors d'une ou deux exceptions fugitives. Les 2h20 ne font alors que dérouler l'inéluctable, l'extermination de ces soldats de l'Empire, en large infériorité numérique, et privé de tout espoir de renfort, le reste du Pacifique étant déjà tombé dans les mains des Alliés.

Alors qu'Eastwood tenait là un sujet splendide, son scénariste Paul Haggis, décidément très axé sur le pathos, transforme l'entreprise en une enfilade de clichés. Les personnages sont manichéens, leurs relations prévisibles, et le traitement psychologique, naïf : oui, les Japonais n'étaient pas que de la chair à canon, c'était des hommes (révélation !), non, les Américains n'étaient pas tous gentils (bis). Par contre, les spécificités culturelles du Japon sont passées sous silence, rien ne permet de comprendre ou d'avoir de l'empathie pour ces soldats sacrifiés. Du coup, Letters From Iwo Jima souffre d'un défaut majeur, celui de ressembler hélas à un film hollywoodien... tourné en japonais : il ne propose pas de point de vue, procure une petite sensation de voir pour une fois l'envers du décor, mais c'est une illusion. Il n'apporte hélas... rien. Il ne fait que servir la soupe aux amateurs de "beaux films", larmoyants et tristes à souhait.

La réalisation et la photographie sont heureusement là pour nous montrer que nous avons affaire à un monsieur de la trempe de Clint Eastwood. Quelques séquences, grâce aussi au talent des comédiens, sont réellement prenantes et magnifiques, mais c'est un sentiment de gâchis qui prévaut quand on pense à la stature du réalisateur derrière un tel projet qui passe vraiment à côté de son potentiel.

7/10

14:17 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

26 février 2007

Primer



Primer, sorti sur seulement 6 copies en France, arrive chez nous avec retard, mais auréolé d'un buzz dû à quelques faits pas communs : tourné à l'arrache chez des amis, primé entre autres à Sundance en 2004 ; écrit, produit, tourné, éclairé, monté, interprété par autodidacte, Shane Carruth, pour une somme ridicule, cela a en effet tout du film culte.

Le pitch semble être une énième variation du voyage dans le temps, sujet inépuisable :

Deux ingénieurs développent à leur temps perdu une machine capable de réduire la masse des objets. Alors qu'ils en sont à peine à considérer les applications pratiques d'une telle invention, ils découvrent une capacité inattendue de leur machine : l'échelle temporelle ne serait pas la même à l'intérieur qu'à l'extérieur. Ils s'empressent d'en construire un modèle suffisamment grand pour en expérimenter les effets sur eux-mêmes...

Néanmoins, le film se démarque par une volonté de coller à un vocabulaire très technique (une bonne partie du film est axée sur la laborieuse élaboration de la boîte et la découverte de ses effets), et à un effet limité : les protagonistes ne se baladent pas dans le temps, ils doivent s'enfermer plusieurs heures dedans pour "revenir" quelques heures dans le passé. Le film tente donc d'être beaucoup plus dans la "science" que dans la "fiction", ce qui est voulu bien entendu aussi par le budget serré, et le background matheux du cinéaste, ingénieur dans la vraie vie.

Formellement, le film est impressionnant pour un coup d'essai en 16mm : les teintes froides, associées à des prises de vue souvent lointaines, confèrent un aspect documentaire, néanmoins tempéré par un montage très inventif. En voyant cela, on peut se dire que Shane Carruth marche sur les pas de Darren Aronofsky (Pi) ou Vincenzo Natali (Cube) : l'exploitation extrêmement futée d'un budget ridicule pour exploiter une histoire hors du commun.

Or, le film prend le pari osé d'être très "rubik's cube", quasiment uniquement axé sur les paradoxes temporels, qu'il ne cherche absolument pas à éviter, au contraire, mais à confronter, ce qui là encore le démarque. Il faut donc une concentration très intense pour arriver à suivre, et encore, il est probablement impossible de comprendre tout du premier coup. Cela ne me pose pas de souci, au contraire, mais le problème est : Primer donnera-t-il envie d'être revu pour mieux en percer le mystère ? Pas sûr, car au-delà de ce simple jeu technique, Primer brille par l'absence d'émotion. Les personnages ne sont pas approfondis et le scénario ne permet pas d'exploiter vraiment ce qu'on comprend vers la fin du film.

Heureusement, Primer ne dure qu'1h17, mais n'y allez pas pour vous divertir, ni même pour espérer débattre du film pendant des heures : Primer est comme un mode d'emploi compliqué, il faut l'avoir sous les yeux pour en tirer quelque chose. Avis aux amateurs...

6/10

18:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

23 février 2007

Bug



On ne présente plus William Friedkin. Il a fallu 10 mois pour découvrir enfin son nouveau film, très remarqué à la sélection de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2006. L'attente était donc élevée, surtout après sa traversée du désert durant les années 90, et l'espoir retrouvé avec The Hunted (2003).

Huis clos adapté d'une pièce de théâtre, Bug ne renie pas ses origines et est une véritable leçon de mise en scène et de direction d'acteurs. A plus de 70 ans, le subversif réalisateur américian montre qu'il a encore un savoir-faire envié.

Bug est ni plus ni moins que la descente aux enfers de deux individus à la dérive et en proie à la paranoïa (qui prend ses origines dans des causes donnant une dimension politique au film). Bug est tellement osé et parfois hystérique qu'on peut arriver à en rire ; oui, ce grotesque est à la fois comique, et terrifiant. Bug est une expérience, qui peut tout à fait se couper d'une bonne partie du public. Si vous avez aimé Naked Lunch de Cronenberg, il ne faut pas rater Bug, qui pourrait aussi bien lui aussi être adapté d'un roman de William S. Burroughs.

C'est finalement assez rare, donc il faut le signaler, le travail sur la bande-son et sa spatialisation est remarquable. Le film perdrait un grand intérêt être vu en stéréo. Enfin, si on veut chipoter, on pourrait dire que Bug est peut-être trop long d'environ 10 minutes pour être presque parfait formellement. Le récit prend le temps de (trop ?) installer les personnages principaux, et le rythme prend ensuite assez brutalement une accélération déstabilisante.

8/10

16:43 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma