26 février 2007
Primer
Primer, sorti sur seulement 6 copies en France, arrive chez nous avec retard, mais auréolé d'un buzz dû à quelques faits pas communs : tourné à l'arrache chez des amis, primé entre autres à Sundance en 2004 ; écrit, produit, tourné, éclairé, monté, interprété par autodidacte, Shane Carruth, pour une somme ridicule, cela a en effet tout du film culte.
Le pitch semble être une énième variation du voyage dans le temps, sujet inépuisable :
Deux ingénieurs développent à leur temps perdu une machine capable de réduire la masse des objets. Alors qu'ils en sont à peine à considérer les applications pratiques d'une telle invention, ils découvrent une capacité inattendue de leur machine : l'échelle temporelle ne serait pas la même à l'intérieur qu'à l'extérieur. Ils s'empressent d'en construire un modèle suffisamment grand pour en expérimenter les effets sur eux-mêmes...
Néanmoins, le film se démarque par une volonté de coller à un vocabulaire très technique (une bonne partie du film est axée sur la laborieuse élaboration de la boîte et la découverte de ses effets), et à un effet limité : les protagonistes ne se baladent pas dans le temps, ils doivent s'enfermer plusieurs heures dedans pour "revenir" quelques heures dans le passé. Le film tente donc d'être beaucoup plus dans la "science" que dans la "fiction", ce qui est voulu bien entendu aussi par le budget serré, et le background matheux du cinéaste, ingénieur dans la vraie vie.
Formellement, le film est impressionnant pour un coup d'essai en 16mm : les teintes froides, associées à des prises de vue souvent lointaines, confèrent un aspect documentaire, néanmoins tempéré par un montage très inventif. En voyant cela, on peut se dire que Shane Carruth marche sur les pas de Darren Aronofsky (Pi) ou Vincenzo Natali (Cube) : l'exploitation extrêmement futée d'un budget ridicule pour exploiter une histoire hors du commun.
Or, le film prend le pari osé d'être très "rubik's cube", quasiment uniquement axé sur les paradoxes temporels, qu'il ne cherche absolument pas à éviter, au contraire, mais à confronter, ce qui là encore le démarque. Il faut donc une concentration très intense pour arriver à suivre, et encore, il est probablement impossible de comprendre tout du premier coup. Cela ne me pose pas de souci, au contraire, mais le problème est : Primer donnera-t-il envie d'être revu pour mieux en percer le mystère ? Pas sûr, car au-delà de ce simple jeu technique, Primer brille par l'absence d'émotion. Les personnages ne sont pas approfondis et le scénario ne permet pas d'exploiter vraiment ce qu'on comprend vers la fin du film.
Heureusement, Primer ne dure qu'1h17, mais n'y allez pas pour vous divertir, ni même pour espérer débattre du film pendant des heures : Primer est comme un mode d'emploi compliqué, il faut l'avoir sous les yeux pour en tirer quelque chose. Avis aux amateurs...
6/10
18:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma
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