23 juillet 2006
Adam's Apples
Le Danois Anders-Thomas Jensen est décidément un des réalisateurs-scénaristes les plus originaux d'Europe. En 2005, sa comédie dramatique Les Bouchers Verts avait constitué une des plus grandes surprises de l'année : deux amis un peu paumés montent une boucherie, dans laquelle quelqu'un meurt par accident. Le corps finit dans les préparations vendues à la clientèle, les deux compères ne sachant comment se débarrasser du corps. A leur grande surprise, les ventes décollent, et se pose alors le problème d'arriver à continuer à satisfaire la clientèle en leur fournissant cette viande à la saveur très originale mais à l'approvisionnement plus que délicat...
Au-delà de l'intrigue principale qui laissait suggérer (à tort !) une comédie trash, Les Bouchers Verts évoquait avant tout l'ennui et le mal être d'individus en marge de la société figée. Le résultat était un film décalé, mais subtil, drôle sans être cynique, et surtout étonnant par sa maîtrise, tant formelle que scénaristique.
On peut reconduire exactement les mêmes éloges à l'égard d'Adam's Apples, sur un sujet fort différent, ce qui confirme le grand talent de Jensen.
Convaincu de la bonté fondamentale de l'homme, un pasteur, Ivan, se voue tout entier et tout sourire à sa mission : accueillir d'anciens taulards et oeuvrer à leur réhabilitation. Arrive ainsi dans sa paroisse Adam, un chef de bande de nazis à qui il reste quelques semaines de peine à purger. Rangers, crâne rasé, croix celtique tatouée sur le biceps, et portrait d'Hitler qu'il accroche fièrement à la place de la croix de Jésus dans sa chambre : Adam est le Diable incarné et il le revendique. Que peut alors valoir la foi d'Ivan face à la malveillance faite homme ? Bref, que peut Dieu face au Diable ? Grande question, qui s'efface bientôt au profit d'une interrogation tout aussi cruciale : d'Adam ou d'Ivan, qui est le plus dérangé des deux ?
Encore fois, Jensen prend le spectateur par surprise en l'emmenant sur un terrain qui n'est pas du tout celui que pouvait laissait présager l'intrigue de départ. Les rebondissements sont nombreux et il est impossible de deviner où va aboutir le film. Quelques scènes sont particulièrement dures et cruelles, âmes trop sensibles s'abstenir. On n'en dira pas plus pour ne rien déflorer de ce film qui ne se raconte pas, mais qui se savoure.
Il faut noter qu'on retrouve une grande partie des acteurs principaux des Bouchers Verts, dont l'extraordinaire Mads Mikkelsen, qui connaîtra enfin, je l'espère, la reconnaissance d'un plus vaste public puisqu'il incarne le méchant Le Chiffre dans le prochain James Bond, Casino Royale. Ca ne serait que justice !
8/10
13:43 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0)
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