11 octobre 2009
(500) Days of Summer
Marc Webb est connu pour ses clips musicaux ; Maroon 5, My Chemical Romance, Incubus, Lenny Kravitz, Green Day, Coheed And Cambria ou encore Evanescence ont tous fait appel aux services du jeune réalisateur américain. Pour son premier long-métrage, il a choisi de s'attaquer à une comédie romantique, genre qui ne doit pas compter beaucoup de chefs-d'œuvres.
Pour échapper aux clichés, Webb et son scénariste ont choisi une structure narrative non linéaire (effeuillage des 500 jours dans le désordre), ce qui permet de renverser immédiatement la situation : on sait d'emblée que l'histoire d'amour va mal finir, et le film se propose plus de livrer - avec malice, humour et souvent gravité - l'anatomie de cette histoire du boy meets girl, histoire plus acide que sucrée. On échappe donc à toute mièvrerie, et Marc Webb s'avère être un réalisateur plein d'idées originales de mise en scène (ex. : l'utilisation géniale du split screen, l'incursion inattendue d'une scène de comédie musicale pour décrire le sentiment de griserie du personnage masculin), n'hésitant pas à sortir des sentiers battus, avec beaucoup d'énergie ; bref, à suivre.
Le titre du film a encore été traduit avec malheur : de (500) Days of Summer, on passe à (500) Jours ensemble, ce qui fait perdre intégralement le jeu de mots, puisque Summer est le prénom du personnage principal interprété par Zooey Deschanel. Or c'est bien sur son personnage que repose la saveur du film ; à la fois ingénue et furieusement insaisissable, échappant à toute rationalité masculine, elle incarne avec perfection (et un charme fou) l'amour impossible. Dommage que Joseph Gordon-Levitt soit quant à lui un peu fade dans le rôle principal masculin.
Enfin, le film est éminemment sympathique par ses références musicales, qu'il aurait été étonnant de ne pas trouver au vu du pedigree de Marc Webb. L'univers est donc ultra-référencé (Joy Division et The Clash apparaissent sur des t-shirts, les Smiths sont un sujet de conversation, un album solo de Morrissey est visible dans les chambres des deux personnages du couple, et Ringo Starr fait l'objet d'une blague récurrente). La B.O. n'est pas en reste avec The Smith, The Clash, Simon & Garfunkel et même Carla Bruni (ce qui n'a pas manqué de faire sourire par chez nous, évidemment).
Marc Webb n'a désormais plus qu'à s'attaquer à un sujet plus consistant, et à abandonner quelques tics du cinéma indépendant américain, et son prochain film devrait lui valoir une belle reconnaissance.
7/10
11:10 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, marc webb, joseph gordon-levitt, zooey deschanel
03 octobre 2009
District 9
District 9 est le premier long-métrage du néo-zélandais Neill Blomkamp (le réalisateur de l'avant-gardiste pub de 2004 pour la Citroën C4 qui se transforme en robot dansant, bien avant le film Transformers de Michael Bay). Son compatriote Peter Jackson a fait office de producteur, en lui allouant un budget de 30 millions de dollars pour réaliser son premier film.
Le moins que l'on puisse dire, c'est le bonhomme est très prometteur. Outre l'aura de son célèbre parrain, il accumule les bons points : un pitch original (des extraterrestres arrivés sur Terre en 1982 sont parqués dans un township de Johannesburg, le district 9, où ils se reproduisent, deviennent ingérables et on entreprend de les déménager dans un camp d'accueil digne de ce nom), un style faux documentaire, low-fi, rappelant le principe faussement amateur à la YouTube vu dans Cloverfield, des acteurs totalement inconnus (la plupart n'étant pas acteurs de profession), ou encore des effets spéciaux portant la marque de l'artisanal (budget réduit oblige), mais diablement plus crédibles qu'un truc de Lucasfilm.
Le film démarre sur les chapeaux de roue, grâce à l'exploitation parfaite du programme annoncé : les habitants de Johannesburg dénoncent la situation invivable engendrée par les réfugiés aliens, espèce de grandes "crevettes" repoussantes qui grouillent souvent à l'arrière-plan. Grâce au montage faux-documentaire (interviews, extraits de faux journaux, fausses archives etc.), on est immergé immédiatement dans cette uchronie dont on peut s'étonner que personne n'en avait encore eu l'idée. Le choix de Johannesburg plutôt qu'une grande métropole occidentale est brillant, car la pollution et la crasse des bidonvilles humains et aliens tissent une métaphore un peu grosse mais qui donne au film une tout autre connotation que simplement SF : en filigrane, c'est évidemment l'Apartheid qui est évoquée. L'homme est un loup pour l'homme, mais il est encore pire envers l'alien ; petit à petit, la situation sera retournée, le plus hideux n'étant pas forcément celui étant le plus repoussant physiquement.
Il convient de pas en dire plus afin de ne pas atténuer les nombreuses bonnes surprises de ce premier coup d'essai remarquable, à la puissance visuelle et à l'inventivité énergique rares. Le seul défaut de District 9, c'est probablement de tenter d'explorer trop de directions à la fois, comme si Blomkamp avait voulu déverser toutes les idées accumulées depuis des années. District 9 ressemble à un croisement monstrueux entre Carpenter, Verhoeven et Cronenberg. C'est sa force mais aussi sa limite, les 1h50 sont presque frustrantes tant il y avait à encore à dire.
8/10
12:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, neill blomkamp, sharlto copley
26 août 2009
Inglourious Basterds
Après l'inégal Death Proof, il y avait nombre de fans de Tarantino, dont je fais partie, qui espéraient vivement que le cinéaste allait se ressaisir. Le problème de Tarantino, c'est clairement son excès de vanité qui semble avoir pris une ampleur démesurée depuis qu'il a renoué avec le succès critique et public grâce à Kill Bill (tour de force il est vrai, retour magistral après le relatif échec commercial de Jackie Brown). Le bonhomme semble tout bonnement croire qu'il peut, par la grâce de sa mise en scène, transcender n'importe quel dialogue médiocre, transformer n'importe quelle scène en moment culte.
Déjà, il s'était fait damer le pion par son ami Robert Rodriguez dans leur programme Grindhouse, le jouissif Planet Terror coiffant sans problème au poteau Death Proof qui ne s'inscrivait finalement pas tellement dans l'esprit Grindhouse. Avec l'accueil plutôt frais à Cannes 2009 de Inglourious Basterds (hormis le prix d'interprétation masculine pour Christoph Waltz), mes craintes étaient élevées, et donc mes attentes revues sagement à la baisse.
C'est probablement grâce à cela que finalement, je suis sorti fortement soulagé du visionnage de ce nouveau long-métrage. La prise de risque est néanmoins importante, car encore une fois, comme avec Death Proof, Tarantino ne délivre pas vraiment le programme vanté. Malgré les affiches, les taglines, le pitch et la bande-annonce, non non et non (nein nein nein !), Inglourious Basterds ne donne pas dans le spectacle sanglant et débridé d'exécution sauvage de nazis. Cette thématique occupe finalement une place toute petite dans les 2h33 du film.
En fin de compte, l'opinion de chacun sur Inglourious Basterds sera donc grandement influencée par les attentes consciemment (ou inconsciemment) placées dans le film, puisqu'un nouveau Tarantino reste encore et toujours un événement. Si on fait abstraction du programme annoncé de destruction de nazis, et si on fait abstraction de la durée bien trop longue (Tarantino manque vraiment de recul pour ne pas voir que son film serait diablement meilleur en lui enlevant 20 bonnes minutes), il reste un film qui ne devrait pas décevoir les cinéphiles. OK, ça fait pas mal de si... mais j'ai envie de voir le verre au trois-quarts plein plutôt qu'au quart vide.
Car Tarantino n'était pas loin de reproduire un coup de maître. Franchement hors normes et bien plus intéressant que Death Proof, Inglourious Basterds est un film délirant, novateur et gonflé. Tarantino ose, et on aime le suivre quand il se lance ainsi dans l'inconnu. Inglourious Basterds ressemble grosso modo à une B.D. filmée (Pulp Fiction était l'essence cinématographique même du comic), mais dans le cadre de la seconde guerre mondiale : il fallait y penser, Quentin l'a fait. Inglourious Basterds est une uchronie qui réalise des fantasmes fous, qu'on taira pour ne pas spoiler. De fait, tout est outrancier, grotesque, à l'encontre des conventions, mais porté par des fulgurances de mise en scène et de montage qui n'appartiennent qu'à Tarantino.
Fini les dialogues creux et interminables sur des sujets populaires médiocres ; de par sa situation géographique et historique, Tarantino est contraint de parler de culture, de vraie culture, et utilise à bon escient son expertise immense de cinéphile, pour placer avec un talent sidérant le cinéma au cœur de son film. Cette mise en abyme, totalement inattendue, balaie presque les défauts agaçants du film : les gimmicks qui deviennent lassants (comme le découpage en chapitres, les arrêts sur image pour introduire des personnages, les emprunts à Ennio Morricone...), les scènes mal écrites entre Mélanie Laurent et Daniel Brühl, et le jeu bien pâle de ce dernier.
Dans l'ensemble, malgré quelques faux pas, Inglourious Basterds est une preuve que Tarantino reste un cinéaste surdoué, hors du commun, qui s'amuse encore et toujours à faire voler en éclats les genres codifiés pour mieux les réinventer, et qui sait communiquer avec un enthousiasme contagieux son amour immodéré pour le cinéma. Si l'homme pouvait trouver un moyen de canaliser son énergie, et faire montre d'un peu plus d'humilité et de recul, nul doute qu'il aurait encore les capacités à nous clouer le bec avec un nouveau chef d'œuvre.
8/10
08:08 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : quentin tarantino, brad pitt, mélanie laurent, christoph waltz, michael fassbender, eli roth, diane kruger
21 août 2009
Up
Le titre de la dernière production de Pixar indique - probablement involontairement - leur positionnement vis-à-vis de la concurrence. Pixar continue en effet de survoler tranquillement, à des niveaux stratosphériques, le domaine de l'animation, et pour longtemps encore. Même si les prouesses techniques peuvent un jour être égalées, Pixar demeure le meilleur story teller d'Hollywood, et sur ce plan, on n'est sans doute pas près de lui passer devant. Qui d'autre est capable, depuis des années, de créer des divertissements aussi haut de gamme, à plusieurs niveaux de lecture, avec des partis pris aussi osés ? A ce dernier égard, le résumé aussi magique que tragique de la vie de Carl et sa femme dans les premières minutes de Up sont aussi renversantes que le début quasi-muet de Wall-E.
C'est que Pixar, en défiant les conventions, ne sous-estime jamais ses spectateurs, surtout les plus jeunes, et ose la prise de risques. Les plus jeunes enfants ne comprendront pas toutes les subtilités de leurs scénarii ? So what ? Les scènes d'action sont jubilatoires à tout âge, et l'ensemble des œuvres Pixar sont faites pour être vue et revues ; elles accompagneront des années durant le développement intellectuel des enfants, qui s'étonneront un jour de découvrir des facettes jusqu'alors invisibles pour eux. Pour Pixar, il semble impensable de nager dans la médiocrité de l'humour décérébré et premier degré de bon nombre de studios qui ont fait le raccourci "animation = film racoleur et facile, ciblé pour gamins".
Les adultes, quant à eux, peuvent continuer de s'émerveiller devant les références et hommages discrets au cinéma, les leçons de vie habiles et philosophiques (voire politiques) tout en nuances, portées par des personnages toujours plus étonnants (oser faire d'un vieillard un héros... sueurs froides pour les produits dérivés de Disney !). Vu comme Pixar a toujours une longueur d'avance et se fait souvent copier par son concurrent DreamWorks, on pourrait en déduire que c'est a priori les seniors qui seront bientôt à la mode. Quel tour de force réalise donc encore Pixar avec Up, dont le héros a tout, sur le papier, pour ne provoquer qu'un haussement de sourcil contrarié...
Il ne sert donc pas à grand-chose d'épiloguer sur Up, il convient juste d'aller le voir, Pixar étant devenu depuis longtemps un gage d'excellence, de haut de gamme. Je souhaitais juste faire remarquer que la version 3D du film possède un intérêt réel, mais qui là encore prend le contrepied des clichés : non, il n'y a pas d'effets extrêmes et pénibles, Pixar ne prend pas son film pour une démo du Futuroscope. La 3D est utilisée à dessein pour simplement détacher les personnages du décor et accentuer le réalisme des scènes. Seules les grosses lunettes, un peu lourdes, sont à améliorer. Mais ce n'est pas du ressort de Pixar !
9/10
12:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : cinéma, pete docter, bob peterson
07 août 2009
Bancs Publics (Versailles Rive Droite)
Si les casting de luxe ne font pas les grands films, en voilà en tout cas une belle illustration, hélas. Bruno Podalydès semble être en panne depuis l'inégalé Liberté-Oléron ; après des aventures peu folichonnes de Rouletabille, le voici qui remet le couvert de la faune versaillaise sur le mode mineur. Très mineur même : Podalydès essaie de marier les genres (comédie de mœurs, fable humoristique, satire sociale...) au travers d'un film choral, dont les trois unités de lieux sont reliées par des liens trop ténus pour être convaincants. Au final, il n'y a pas vraiment de fil narratif, et Bancs Publics tombe dans le chausse-trappe classique de l'enchainement des saynètes de qualité très inégale.
Ce n'est pas le plus grave à mon sens car de grands cinéastes savent s'accommoder d'absence de fil narratif, justement. Le problème de Podalydès ici, c'est qu'il met en scène son film comme une pièce de théâtre, à tel point qu'il en est pratiquement réduit à son texte. Tout le poids étant sur les mots, les dialogues sont surjoués, par des célébrités qui n'ont que ça à se mettre sous la dent, dans des rôles très peu dessinés de M. et Mme Tout-le-Monde, et qui en deviennent du coup rapidement pénibles (un exemple parmi d'autres : le gag lamentable de Pierre Arditi en patron qui commet des lapsus grossiers invraisemblables pendant son discours - même l'acteur ne semble pas y croire !). L'anecdotique des situations confine au futile, et Podalydès finit paradoxalement par ne plus rien dire.
Et c'est dommage, car les premières minutes sont brillantes, avec une proposition intéressante qui consiste à fédérer autour d'un évènement extraordinaire (une banderole "homme seul" déployée en face de bureaux) des employés qui ne se côtoient que dans des situations ordinaires et codifiées. Il y a également des éclairs burlesques réussis, qui viennent heureusement de temps à autre à la rescousse de l'ensemble. C'est trop peu.
5/10
19:24 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, bruno podalydès, denis podalydès