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06 avril 2006

Enfermés Dehors



Ouf ! Dupontel est enfin de retour en tant que réalisateur avec son troisième long-métrage, 7 longues années après Le Créateur. Comme le bonhomme s'en est expliqué dans diverses émissions radio (comme Cinéfilms de France Inter), il y a quelques années il a reçu plusieurs appels du pied d'Hollywood et malgré le temps passé là-bas, rien n'a abouti (d'après Dupontel, tout est trop lourd : trop d'avocats, trop d'intermédiaires, etc.). Autant de temps de perdu... même si Dupontel, l'acteur, n'a certes pas été totalement absent (films majeurs comme Irréversible ou Le Convoyeur).

Avec Enfermés Dehors, on reste dans son univers particulier ; avec un pitch original, (un SDF trouve un uniforme de flic et va en profiter pour manger gratuitement à la cantine d'un commissariat, mais rapidement il va en tirer parti pour échapper à sa condition et changer le cours de la vie d'autres personnes), Dupontel se livre à ses gags burlesques, voire absurdes, sur des sujets qui ne prêtent pas forcément à rire à la base (et là est toute sa force). Malgré le divertissement imparable, la satire sociale est sous-jacente.

Le rythme effréné (mais pas frénétique, malgré le très grand nombre de plans) permet de masquer les petites faiblesses du scénario (quiproquo un peu mou, revirements de situation un peu maladroits...). La réalisation est très technique, et se démarque vraiment du niveau habituel des films français. Certains plans très travaillés au niveau de l'image (couleurs saturées, objectifs à très grand angle) rappellent par instants le travail de Jean-Pierre Jeunet, surtout que le casting a su trouver une brochette de "gueules" très photogéniques.

Dupontel parle de son film comme un cartoon (ou BD) filmé(e), et force est de constater que Tex Avery n'est pas loin. L'influence des Monty Python (surtout Terry Gilliam) est évidente mais pas écrasante ; au très grand plaisir de Dupontel, Terry Gilliam fait d'ailleurs un caméo dans le film (ce dernier aimant vraiment ce que fait Dupontel), tout comme l'autre ex-Monty Python Terry Jones (déjà présent dans Le Créateur).

Un amateur de musique, notamment rock et hard-rock comme moi ne peut pas ne pas mentionner l'utilisation de musique musclée dans la bande-originale de ce film ! Non seulement Denis Barthe et Jean-Paul Roy de Noir Désir ont composé spécialement pour le film, mais on entend aussi des titres du répertoire du groupe. J'ai particulièrement aimé un clin d'oeil en particulier : l'utilisation du morceau "Slaughter House" du groupe (obscur) de thrash américain Powermad ! Où Dupontel est-il allé chercher cela ? Sans trop m'avancer, je pense qu'on peut répondre à coup sûr que c'est grâce à la bande-originale de Wild At Heart (Sailor et Lula), de David Lynch (dont Dupontel est admirateur), car le riff de ce morceau déchaîné n'a percé que grâce au film de Lynch.

Sans être un chef d'oeuvre, le nouveau Dupontel est tellement original et tellement au-dessus du lot commun des comédies ou satires françaises qu'il est tout de même incontournable pour qui aime le rire burlesque et futé.

7/10

11:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Cinéma

04 avril 2006

El Aura



Voici peut-être LA pépite des films sortis en mars (mois très creux à mon avis) : le deuxième film de l'Argentin Fabián Bielinsky (probable futur prodige à continuer de surveiller de près), après le succès assez impressionnant de son premier long-métrage, Les Neuf Reines (Nueve Reinas, 2000), qui avait finit par sortir sur nos écrans en 2002 après une tournée fructueuse en récompenses des divers festivals du monde (ce qui n'a pas manqué d'attirer l'attention des Américains pour en faire un médiocre remake, Criminal, en 2004).

Nueve Reinas était un brillant exercice de style sur la manipulation, dans la lignée de films mémorables comme Memento, Usual Suspects ou encore The Game. Si le scénario était indéniablement malin, avec énormément de dialogues, la mise en scène était prometteuse par sa vivacité et sa virtuosité qui n'était pas sans me rappeler celle de Brian De Palma.

C'est cette référence qui me vient le plus à l'esprit pour la cinématographie de El Aura, qui prend néanmoins un virage total par rapport à Nueve Reinas : économie de dialogues, mélange de genres (thriller, polar, drame social...), changement total de cadre (nature splendide cette fois, à l'opposé du cadre citadin des Neufs Reines, et utilisation extrêmement intelligente des animaux dans le film ; le personnage principal étant taxidermiste, ce qu'exploite savamment Bielinsky). On retrouve néanmoins par moments, lors des rares scènes d'action, la fulgurance des Neufs Reines ; mais dans l'ensemble, le film entretient une tension constante, étouffante, et met en place un puzzle de façon lente, sans doute trop lente pour beaucoup. Le film dure 2h14 et est en effet peut-être un tout petit trop long, mais je ne vois pas vraiment quoi enlever car il est très dense, très écrit, munitieusement maîtrisé, et chaque détail, chaque élément, chaque plan compte.

Il y a un grand nombre de détails de mise en scène qui régaleront les cinéphiles amateurs de technique, donc je ne les révèlerai pas ici ; néanmoins, ce n'est jamais gratuit ou tape à l'oeil. Bielinsky est un esthète sensible et inspiré et c'est devenu ô combien rare. Côté interprétation, on est également dans le haut de gamme, et l'acteur Ricardo Darín (déjà une des deux "vedettes" des Neuf Reines) confirme ici qu'il est un surdoué, ou plutôt, un acteur-né, tant la sensation de naturel qu'il dégage est éblouissante (notamment, la palette d'émotions qu'il sait faire passer dans ses yeux est assez stupéfiante). Sa filmographie reste injustement cantonnée à des films sud-américains qui ne sortent pas toujours de leur frontière, mais peut-être est-ce dû à une absence de maîtrise de la langue anglaise.

Le cinéma sud-américain, qu'il soit filmé en langue espagnole ou portuguaise, continue à nous offrir de sacrées belles surprises et Bielinsky vient - pour moi - de rejoindre pour de bon le club des très doués, aux côtés de Fernando Mereilles, Alfonso Cuarón, Carlos Sorin, Walter Salles, etc. Un film à voir pour les cinéphiles qui se sentent peut-être blasés de ne plus voir à la fois de la maîtrise et de l'originalité sur nos écrans.

9/10

11:30 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

03 avril 2006

David Gilmour, Olympia, 16/03/2006



Chaque apparition en concert des rarissimes membres ou ex-membres de Pink Floyd, Roger Waters et David Gilmour, fait figure d'événement, et à juste titre. On n'avait plus vu Gilmour sur scène depuis 2002, et son dernier album solo remontait à 1984 !

A l'occasion de la sortie de On A Island, son troisième album solo, David Gilmour a repris le chemin des salles des concerts européennes, et pour présenter cet album plutôt calme, il a préféré des salles plus intimistes que le Palais Omnisports de Paris Bercy. Tant mieux pour la musique, mais tant pis pour le rapport offre/demande, même avec deux dates à Paris, au Grand Rex le 15 mars et à l'Olympia le 16 mars. Deux salles exceptionnelles, avec des tickets d'entrée stratosphériques.

Néanmoins, la prestation était d'une qualité qui ne fait pas regretter l'argent investi. Gilmour n'est pas qu'un mythe grâce à ses compositions pour Pink Floyd, c'est toujours un guitariste au toucher magique, au son qui continue de désespérer des hordes d'apprentis guitaristes sur Fender Stratocaster. Le voir en chair et en os dans un cadre aussi privilégié que l'Olympia permet de comprendre que l'homme est touché par la grâce et qu'un tel talent ne s'explique pas, et ne s'approche pas ; il est unique, indicible. Lorsque Gilmour a pris le saxophone sur Red Sky At Night, on retrouvait le même phrasé, aussi fluide et rêveur.

J'avoue, je ne pensais pas être aussi ému de voir enfin cet artiste. J'ai vu près de 200 concerts et quasiment tous les plus grands guitaristes qui comptent pour moi, je suis donc forcément assez blasé et difficilement impressionnable, mais tout le groupe m'a ici laissé béat d'admiration. Loin des spectacles ou de toute mise en scène (ici, pas l'ombre d'un écran ou d'un backdrop), habillés de manière on ne peut plus sobre (un tshirt et un pantalon noir pour Gilmour), les musiciens sont ici entièrement dévoués à une prestation axée sur l'interprétation et le feeling. Il faut au moins avoir vu Comfortably Numb une fois dans sa vie jouée sur scène par Gilmour : si ce n'est pas le Paradis, c'en est la plus proche incarnation terrestre...

Gilmour a beau avoir la réputation d'un perfectionniste avec des shows où tout est minutieusement réglé, le concert de l'Olympia nous a réservé 3 surprises :

1) Pendant le premier set, normalement dédié à l'interprétation complète de On A Island, la choriste Sam Brown (qui a participé à la dernière tournée de Pink Floyd, cf. Pulse) est venue sur scène en invitée surprise pour interpréter The Great Gig In The Sky entre The Blue et Red Sky At Night ! Gilmour s'est alors tranquillement installé au lapsteel, bien entendu. Premier grand frisson de la soirée, et exclusivité sur la tournée !

2) Lors de l'intro de Shine On You Crazy Diamond, au bout de plusieurs minutes, un bruit parasite est venu perturber Gilmour, qui s'est arrêté de jouer et a préféré reprendre le morceau depuis le début ; il a néanmoins grandement accéléré l'intro, avec un style de jeu différent, et le reste du groupe a su se caler parfaitement sur lui. Bluffant ! (et merci au hasard pour le rabe, du coup...)

3) La setlist avait alors été inchangée depuis le début de la tournée, mais Gilmour a exhumé à l'Olympia le titre Fat Old Sun de l'album Atom Heart Mother (en lieu et place de Dominoes sur les autres dates).

Voici la liste des musiciens qui accompagnait Gilmour sur cette tournée. Ils assuraient tous des choeurs, selon les titres (voire tous ensemble, comme sur Take A Breath, ce qui était fort impressionnant) :

- Rick Wright, le claviériste de Pink Floyd ; on avait donc deux membres du Floyd pour le prix d'un !

- Guy Pratt à la basse, c'est le musicien qui a enregistré les parties de basse de The Division Bell et a tourné avec le Floyd lors des deux dernières tournées, c'est donc lui qu'on entend sur Delicate Sound Of Thunder et Pulse. C'est un musicien de studio illustre, qui a enregistré aussi bien pour Madonna, Tears For Fears, Robert Palmer, ou encore... Toy Matinee, avec Kevin Gilbert.

- Phil Manzanera, guitariste du mythique Roxy Music, et co-producteur du dernier Gilmour ; musicien de studio très recherché, a joué ou produit les albums de Brian Eno, Nina Hagen, John Cale, John Wetton, etc.

- Jon Carin, claviériste des tournées précédentes de Pink Floyd, touchait en fait un peu à tout : piano, orgue, effets, samples et lapsteel.

- Steve DiStanislao à la batterie (Carl Verheyen, Crosby & Nash), d'une finesse parfaite.

Quant à la setlist, elle était probablement d'un équilibre presque rêvé : un premier set dédié au dernier album de Gilmour, et un deuxième dédié à Pink Floyd, avec les incournables classiques mais aussi des pépites inespérées : Echoes (dans sa version intégrale ! Grande émotion dans la salle) et Wot's... The Deal (jamais jouée sur scène auparavant par Pink Floyd !). Avec l'entracte de 20 minutes, on a frôlé en tout les 3 heures de concert ; pas mal pour un monsieur qui venait de souffler ses 62 bougies ! En espérant que ce n'était pas la dernière fois, en tout cas, merci, Monsieur Gilmour.

Setlist:

Castellorizon
On An Island
The Blue
The Great Gig In The Sky (invitée au chant : Sam Brown)
Red Sky At Night
This Heaven
Then I Close My Eyes
Smile
Take A Breath
A Pocketful Of Stones
Where We Start

--ENTRACTE--

Shine On You Crazy Diamond
Wot's... The Deal
Wearing The Inside Out
Fat Old Sun
Breathe/Time/Breathe Reprise
High Hopes
Echoes

Rappel:
Wish You Were Here
Comfortably Numb

16:45 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : concerts

27 mars 2006

Romanzo Criminale



On ne peut pas dire que ce film italien manque d'ambition, et c'est bien, car chez nous, en France, on en manque terriblement (cf. les critiques des films français vus précédemment). Le souci, c'est qu'on est en droit alors de le juger à la hauteur de cette prétention, car Romanzo Criminale ne s'affiche clairement pas comme un petit film de divertissement. Michele Placido a en effet vu grand : une fresque (ascencion, gloire, déclin), chapitrée, de 2h30, sur un gang de bandits décidés à contrôler Rome dans les années 70, les fameuses années de "plomb" où commencèrent à sévir les Brigades Rouges.

Le gros problème, c'est que Romanzo Criminale se prend les pieds dans le tapis en tentant de plaquer un polar dense sur un fond historique. Le contexte historique est tout juste saupoudré grâce à des images archives, maladroitement intégrées. Ce gros problème se retrouve dans le scénario, où les allusions aux Brigades Rouges ne sont qu'effleurées, sous-entendues, non pas subtiles, mais confuses. On nous laisse soupçonner un vague lien entre les terroristes des Brigades, l'Etat, les services secrets, la Mafia et le gang, mais qui manipule qui ? Pas de réponses, ce qui en soi n'est pas grave, un bon mystère étant souvent plus satisfaisant. Mais ici, tout est trop vite esquissé, trop brouillon pour que l'on puisse imaginer quoi que ce soit. Or, c'était là que le film avait une grosse carte à jouer.

Reste alors uniquement l'aspect polar froid et assez brutal, mais que les 2h30 du film sont alors longues ! Car de ce côté, pas grand-chose d'original à glaner (la pute autour de qui tourne ce microcosme ; le commissaire ambitieux et pas si net que ça ; le gang qui va pourrir de l'intérieur, chacun voulant doubler l'autre...). Il y a trop de personnages, aucun ne bénéficiant d'une psychologie assez approfondie pour qu'on s'attache un peu à eux. Ce manque de densité, d'envergure des personnages est clairement ce qui différencie ce polar d'une oeuvre de Scorsese, pour lâcher l'influence la plus évidente.

C'est dommage car s'il y a une chose qu'on ne peut pas reprocher au film, c'est l'excellence du jeu des acteurs, et c'est agréable de découvrir autant de têtes talentueuses à peu près inconnues chez nous (en dehors de la française Anna Mouglalis). Le film est donc porté par eux, et c'est déjà pas mal, mais insuffisant pour atteindre l'objectif affiché.

6/10

09:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Cinéma

24 mars 2006

Destination Finale 3



Ce troisième volet de la saga n'est ni vraiment meilleur, ni vraiment moins bon que les deux précédents. Avec Destination Finale, on n'est pas pris en traître : on sait à quoi s'attendre, et on obtient ni plus, ni moins. C'est typiquement le genre de films au plaisir coupable, pour lesquels on laisse son cerveau à l'entrée de la salle, un peu comme lorsqu'on se rend dans une fête foraine ou dans un parc d'attraction. Le but est de prendre du bon temps, sans aucune préoccupation culturelle.

La Mort a un plan : elle sait qui elle va prendre, quand et comment. Cependant, si d'aventure un humain avec des facultés un peu hors normes a des "visions", ou des prémonitions, certaines personnes peuvent échapper à une catastrophe prévue par la Grande Faucheuse. Ceci n'est pas acceptable ; les survivants constituent alors une anomalie, un bug, bref une situation qu'il faut réparer dès que possible. La Mort va donc s'acharner pour supprimer ces rescapés, et pour servir ce but, tous les moyens sont bons !

Ce pitch de base de la saga aurait pu vite tourner au ridicule si la Mort était personnifiée à l'écran, mais justement, non. La Mort ne s'incarne qu'à travers l'enchaînement malencontreux de "hasards", de circonstances qui vont aboutir à des mises en scène de morts si possible gore, fun et stressantes tout à la fois pour le spectateur.

L'intérêt de Destination Finale est dès lors son humoir noir, bien macabre et souvent méchant, où l'on assiste à un massacre progressif d'adolescents américains balayant tous les codes des comédies pour teenagers (les dindes style Paris Hilton, le reclus sur lui-même fan de Marylin Manson, le gros balèze qui ne pense qu'au sport, le frimeur obsédé, etc., tous joués avec le talent minimum pour les rendre crédibles)

Ce jeu de massacre fonctionne au final non seulement grâce à un scénario habile (certaines morts sont des petits chefs-d'oeuvre d'inventivité, et les fausses pistes sont légion), mais aussi grâce à une réalisation solide, souvent très technique : ceux qui ont vu Destination Finale 2 savent que la séquence d'ouverture de l'accident sur l'autoroute reste depuis comme une référence du cinéma catastrophe.

L'équivalent, dans Destination Finale 3, est la séquence se passant dans le grand huit de la fête foraine (cf. l'affiche du film). Avouons qu'elle est loin d'égaler son homologue de l'épisode précédent, alors qu'il y avait matière à la rendre encore plus horrible. C'est donc une occasion un peu manquée, car on peut mieux s'identifier au stress des passagers, puisque faire un tour de manège infernal est moins banal que prendre sa voiture (qui n'a jamais pensé à la possibilité d'un accident avant de monter dans un grand huit, qui est pourtant bien plus sûr qu'une autoroute ?).

Ce n'est pas grave, ça reste de bonne facture et la suite de Destination Finale 3 renoue sans problème avec les situations machiavéliques et grand-guignolesques qui provoquent à coup sûr exclamations d'effroi et rires dans la salle.

Vu le succès aux USA, on peut parier qu'il y aura un quatrème épisode. Vu l'inspiration a priori sans fin des scénaristes, on peut penser que la seule limite sera éventuellement la lassitude des spectateurs.

A lire : un classement rigolo, selon plusieurs critères, des meilleures morts des trois épisodes, par le site EcranLarge.com

7/10

16:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Cinéma