Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

04 juillet 2007

Mika, Olympia, 30/06/2007



Auteur/compositeur/interprète, le jeune Michael Holbrook Penniman (24 ans), dit Mika, doit bien sourire en repensant aux refus des maisons de disques aux cours des années passées concernant ses démos : trop excentriques, pas assez conformes à la demande... Finalement, encore un artiste qui a réussi à émerger grâce à MySpace et à l'avis du public. Car c'est bien l'an dernier sur le web que la réputation de Mika a commencé à poindre, qu'un de ses titres a commencé à se vendre en téléchargement, et a finalement convaincu un label d'Universal (Island) de tenter le coup. Bien leur en a pris. Barclay, en France, se frotte les mains. Inconnu il y a 6 mois, Mika jouait au Trabendo le 4 avril dernier, et désormais ce 30 juin 2007 dans un Olympia archi-blindé qui tenait presque de l'événement VIP (filmé en caméras HD ; demande incroyable de places au marché noir ; présence de Pascal Nègre d'Universal pour remise d'un double disque de platine...). Les places pour son concert au Zénith en octobre se sont vendues en quelques heures.

Mika, lui, semble vivre un rêve éveillé. Comme il l'a confié au public, quand il était petit et qu'il passait devant l'Olympia (né d'une mère libanaise et d'un père américain, Mika a passé son enfance en France), pour lui cette salle était celle de Jacques Brel et d'Edith Piaf. Cela lui paraissait donc irréel d'investir cette salle à son tour.

Ce n'est pas pour autant que Mika s'est laissé impressionner, et l'artiste a délivré un show tout simplement époustouflant. Bien qu'ayant vu des tas de concerts et étant parfois un peu blasé, je dois avouer que je ne m'attendais pas à ce qu'un jeune artiste comme lui, ayant finalement une très mince expérience de la scène, en possède déjà pour ainsi dire une totale maîtrise, à tous les niveaux : performance (extraordinaire capacité vocale), jeu de scène (oui, la comparaison avec les plus grands frontmen prend tout son sens), communication avec le public, charisme, passion. Ce mec vit pour et par la musique, et est un pur entertainer-né.

Si Mika compose un deuxième album aussi réussi que le premier, alors il est clair que ce jeune homme va probablement devenir un des plus grandes stars de la musique contemporaine. Il est extrêmement rare d'assister à l'émergence d'un tel talent.

De plus, je n'avais jamais vu une telle ambiance à l'Olympia : un vent de folie a soufflé du début à la fin, avec un public survolté (à la moyenne d'âge pas si jeune que ça), qui n'a fait que sauter et chanter en choeur. Après Relax, Mika a lancé : "Est-ce qu'il y a des Big Girls dans la salle ?" Visiblement pas mal de nanas se sont reconnues, alors Mika a enchaîné : "Alors montrez nous de quoi vous êtes faites !". Sur ce, débarque deux jeunes femmes aux proportions très, très généreuses, en tutu, et c'est parti pour un délire, pas sans rappeler l'esprit des fameuses Fat Bottomed Girls de Queen !

Mika a enchainé les "tubes" (puisque son album n'a en fait aucun point faible), sans aucune baisse de régime, seulement ponctués de deux reprises fort bien réarrangées (Sweet Dreams d'Eurythmics et I Want You Back des Jackson 5 ; excellents choix !).

Au moment du rappel, cinq personnages déguisés en lion, éléphant, poulet, lapin, et perroquet font semblant de se battre. Le lapin gagne, il enlève son masque et on découvre l'excellente et groovy batteur black de Mika (aussi à l'aise dans le rock pêchu qu'aux balais jazzy). Mika a vraiment bien su s'entourer, son groupe sur scène est absolument béton, mention spécialement au bassiste au jeu funky (et hyper efficace aux choeurs), au guitariste et à la section de cuivre (trombone à coulisse). Ils finissent donc le concert sur Lollipop, avec leur déguisement (la tête en moins pour ne pas étouffer !), et c'est la life in cartoon motion qui clôt en beauté le délire, avec pluie de confettis, bulles de savon, ballons, etc.

Véritable OVNI dans le monde de la musique, Mika a su absorber 30 ans de musique, de la pop à la disco, en passant par le glam, le jazz et le funk, pour au final en faire un album très contemporain. C'est enlevé, créatif, dansant et souvent touchant. Son charisme et sa présence sur scène évoquent à la fois la puissance d'un Freddy Mercury ou la sensualité d'un Mick Jagger. Ses capacités vocales hors du commun (il a chanté son premier opéra de Strauss à 11 ans) lui confèrent un atout technique imparable, tout comme sa maîtrise du piano. On ne voit pas bien ce qui pourrait arrêter la déferlante Mika.

Setlist

Relax (Take It Easy)
Big Girl (Your Are Beautiful)
My Interpretation
Billy Brown
Any Other World
Stuck In The Middle
Ring Ring
Sweet Dreams (reprise d'Eurythmics)
Holy Johnny
Happy Ending
I Want You Back (reprise de The Jackson 5)
Love Today
Grace Kelly

Rappel:
Lollipop

Les animaux arrivent sur scène lors du rappel...

Pendant Lollipop les bulles de savons commencent à déferler...

Et ça se termine en pur délire !

12:50 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : concert, mika, olympia

21 juin 2007

Aerosmith, Bercy, 19/06/2007



Ca paraît fou, mais le dernier concert d'Aerosmith en France remontait au 11 juin 1997 à Bercy ! Les ayant ratés à cette époque, je ne me doutais alors pas qu'il me faudrait alors attendre plus de 10 ans pour enfin les voir sur scène.

Or, à force de trop attendre quelque chose, on en vient parfois à être déçu quand on l'obtient. Je ne pense néanmoins pas que ce soit ce qui explique que j'ai ressenti la prestation des Bostoniens comme correcte, mais sans plus.

Aerosmith n'a pas su prendre Bercy par les couilles, c'est clair et net. Des gradins, il était sensible que le groupe n'a pas mis le feu au public, il y a eu trop peu de titres où la fosse a vraiment bougé ou chanté en coeur. J'ai rarement vu un Bercy aussi paisible pour un concert de rock au sens large, alors qu'on avait affaire à une enfilade de classiques.

En dehors de l'infatigable Steven Tyler, les autres membres du groupe commencent hélas vraiment à ressembler des vétérans qui se contentent d'assurer le minimum, exception faite du ténébreux Joe Perry qui n'a quand même pas autant la bougeote que son complice Tyler. Ce dernier n'arrêtant pas d'haranguer la foule et d'arpenter les coursives lui permettant d'aller jusque dans le public, se donne totalement à fond, et assure toujours vocalement.

Mais, Tyler avait beau se démener, il était difficile pour lui d'occuper tout l'espace. Dommage car quand on voit les récents DVD où Aerosmith joue en club aux USA, c'est de la dynamite !

Situé dans les gradins à une distance que j'estime à peu près idéale, j'essaie toujours d'occuper la même zone lors de concert à Bercy. Cela me permet de comparer aussi la qualité du son et je regrette d'avoir à écrire qu'il n'était pas terrible ; la voix, bien mixée en avant, était correctement audible, mais la batterie ruinait le tout à cause d'une réverb' vraiment mal venue, que même mes protections auditives vissées à fond ne permettaient pas de filtrer. Frustrant...

Je reste bien satisfait que Aerosmith soit enfin revenu en France, mais le groupe est sans conteste à revoir dans une salle plus adaptée.

Merci à Jérôme pour l'excellente photo prise avec son zoom optique... Des photos officielles (et superbes) du concert de Bercy sont disponibles ici.

Setlist:
Love In An Elevator
Falling In Love (Is Hard On The Knees)
Cryin'
Eat The Rich
I Don't Want To Miss A Thing
Jaded
Rag Doll
Janie's Got A Gun
Baby Please Don't Go
Hangman Jury/Seasons Of Wither
Dream On
S.O.S. (Too Bad)
Livin' On The Edge
Stop Messin' Around
Sweet Emotion
Draw The Line

Rappel:
Walk This Way
Mama Kin

10:08 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : aerosmith, rock, concert, bercy

15 juin 2007

INXS, La Cigale, 09/06/2007



Le lendemain de leur concert au Festival de Montereau, INXS était donc en tête d'affiche de la Cigale, pour leur premier concert parisien depuis le 1er juillet 1997 !

La seule déception aura finalement été que la salle n'était pas totalement pleine. Pas étonnant : aucun travail de promotion de la part d'Epic pour promouvoir ni leur dernier album, ni le concert. Qu'à cela ne tienne, les spectateurs présents (un brassage assez large de toutes générations) ont vite été chauffés à blanc par un groupe visiblement toujours aussi content de retrouver le chemin d'une vraie tournée européenne. J. D. Fortune n'a pas mis longtemps pour mettre tout le monde dans sa poche, et à partir de Original Sin, la Cigale fut transformée en véritable boîte de nuit rock avec une ferveur me rappelant par moment ce fameux concert de 1993 dont je parle dans ma note précédente.

Cerise sur le gâteau, grâce à l'ambiance, nous eûmes droit à un rappel imprévu, Taste It, issu de Welcome To Wherever You Are (1992), un des tout meilleurs albums de leur carrière, mais méconnu du grand public. C'est l'un des titres les plus électriques et sensuels d'INXS (cf. la prestation osée d'Hutchence dans le clip de l'époque), superbe cadeau pour les fans.

Toutes proportions gardées, le charisme de J.D. Fortune, encore plus efficient dans une salle comme la Cigale est vraiment bluffant. INXS a déjà retrouvé le chemin du succès (charts et radios) en Amérique (et évidemment en Australie), mais il peut également le reprendre en Europe si leur label se décidait à travailler le groupe.

Setlist

Suicide Blonde
Devil's Party
Mystify
Hot Girls
Disappear
By My Side
Afterglow
Hungry
Original Sin
Need You Tonight
What You Need
Folsom Prison (Johnny Cash)
Devil Inside
Pretty Vegas

Rappel #1
God's Top Ten
New Sensation
Never Tear Us Apart
Don't Change

Rappel #2
Taste It

14:10 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (21) | Tags : INXS, concert

11 juin 2007

INXS, Festival Montereau Confluences, 08/06/2007



La dernière (et première fois) fois que j'avais vu INXS, c'était le 10 juin 1993 à Bordeaux, soit 14 ans quasiment jour pour jour. Ce concert restera à jamais gravé dans ma mémoire ; non seulement INXS était mon groupe préféré, mais en plus, Michael Hutchence reste encore aujourd'hui le plus fantastique et sensuel frontman que j'ai pu voir sur scène.

Suite à deux tournées marathon pour les albums qui les avaient installés au faîte de la gloire internationale (Kick en 1987 et X en 1990), INXS avait intelligemment décidé d'expérimenter en sortant un album très réussi artistiquement (Welcome To Wherever You Are, 1992), suivi d'une tournée de clubs ou de "petites" salles, le groupe étant vraiment las des stades et autres arènes.

Ceci permit donc de voir INXS dans d'excellentes conditions, et la Médoquine de Bordeaux fut investie notamment par bon nombre de lycéens pas intimidés à l'idée de faire la fête à la veille de l'épreuve de philo du bac 1993. La salle fut transformée en dancefloor où le public resortit éreinté et quasiment en transe ! Pour ceux qui ont vu la vidéo Live Baby Live du concert de juillet 1991 au Wembley Stadium devant 90 000 personnes, imaginez la même ferveur dans une petite salle surchauffée...

INXS n'avait pas remis les pieds en France depuis le 1er juillet 1997 (Paris, Zénith), Hutchence étant décédé quelques mois plus tard (novembre 1997). Le groupe n'est pas resté pour autant inactif et a repris en 2000 le chemin des concerts avec Jon Stevens (ex-Noiseworks) au chant, pour quelques tournées dont la seule en Europe (Just For Kicks) remonte à 2003 (sans passage par la France). Néanmoins, on attendait toujours un album...

C'est de manière très improbable qu'INXS a donc retrouvé un chanteur : grâce à l'émission américaine Rock Star, qui a permis d'auditionner des prétendants à la mission a priori impossible, succéder à Michael Hutchence. Miracle : le vainqueur, le Canadien J.D. Fortune, possède des qualités que même le groupe n'aurait sans doute pas espéré au départ. Le nouvel album, Switch, sorti fin 2005 (mais plus d'un an après en France, sans aucun travail de promo), confirmait tous les espoirs placés en Fortune : non seulement il ne cherchait pas à "remplacer" Hutchence, mais il ne dénaturait pas le son du groupe, au contraire ; il y contribuait en se montrant fin parolier (ce qu'était aussi Hutchence). C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles Fortune emporta le concours, car INXS avait proposé aux prétendants d'écrire les paroles et mélodies vocales d'un titre composé par leurs soins, et la version de Fortune était de loin la meilleure, ce qui donna le single Pretty Vegas qui fit un carton aux USA et au Canada.

Il restait donc à voir ce que INXS 2.0 allait donner sur scène. Présent de manière un peu inattendue au festival de Montereau Confluences (à 100 km de Paris), le groupe assurait la tête d'affiche du vendredi soir. Après Michel Delpech et Axelle Red, il n'est pas exagéré d'écrire qu'INXS, en débutant son set par Suicide Blonde, a légèrement décoiffé le public un peu sage constitué en majorité de familles tranquilles. Disposant de leur propre rampe de lights, et de leur propre ingénieur du son, la différence de qualité technique était sensible. Et quelle puissance ! En quelques chansons, le public était dans la poche, et pourtant INXS n'a pas joué la carte de la setlist "best-of" puisque pas moins de 7 titres (sur 11) du dernier album furent joués ! La setlist ne fut donc pas adaptée pour le festival, et INXS laissa même de côté leur premier tube international, Original Sin.

Le plus gros atout sur scène d'INXS 2.0, c'est sans doute finalement le même (toutes proportions gardées) que celui de la version 1.0... son chanteur ! Car J.D. Fortune est un sacré entertainer qui sait vraiment aller chercher le public, le faire réagir, et il est de surcroît un interprète à la fois juste et très énergique. Arpentant inlassablement l'immense scène du festival, Fortune a su conquérir peu à peu les 6000 spectateurs du festival. Kirk Pengilly et Tim Farriss n'étant pas en reste au niveau de l'occupation de l'espace. Beau set de 1h30, 17 titres, pour un show sans aucune faille : de superbes retrouvailles qui me firent vraiment chaud au coeur ! Voilà qui augurait bien du concert parisien du lendemain, dans une toute autre configuration : la Cigale (1500 places). A suivre dans une prochaine note...

Setlist

Suicide Blonde
Devil's Party
Mystify
Hot Girls
Disappear
By My Side
Afterglow
Hungry
Never Let You Go
Need You Tonight
What You Need
Folsom Prison (Johnny Cash)
Devil Inside
Pretty Vegas

Rappel:
God's Top Ten
New Sensation
Never Tear Us Apart
Don't Change

17:00 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : INXS, concert

24 mai 2007

Allan Holdsworth, New Morning, 22/05/2007



Je ne suis pas parvenu à retrouver avec certitude à quand remonte le dernier passage d'Holdsworth à Paris mais il semblerait que c'était en 1997. Depuis que j'ai découvert le bonhomme en 1993, quand j'en étais seulement à un an d'apprentissage de la guitare, je rêvais (comme beaucoup) de le voir. C'est fait : amen !

Allan Holdsworth est le guitariste des guitaristes ; la plupart des plus grands sont en effet unanimes pour déclarer qu'il est l'un des plus grands virtuoses de l'instrument et qu'il constitue pour eux une référence absolue. Frank Zappa, s'il ne devait retenir deux noms de guitaristes, répondait : Hendrix et Holdsworth. Dans le "best-of" d'Holdsworth, Against The Clock (2005), le livret offre pléthore de citations provenant d'autres légendes de la guitare.

Eddie Van Halen : "Holdsworth is the best in my book. He's fantastic. I love him...What I can do on two hands, he can do with one".

John McLaughlin : "I've known Allan Holdsworth and his music for 30 years now, and after all this time, he's still amazes me. His concept is still advancing with his playing, and his technical prowess which is phenomenal, is in complete harmony with his musical direction. And this is a very advanced direction" .

Inutile de prolonger la liste, mais sachez que la palanquée des "shredders" comme Steve Vai, Joe Satriani ou Yngwie Malmsteen sont également en extase devant Holdsworth. C'est d'autant plus frappant que Holdsworth, lui, n'a jamais connu les grâces de la reconnaissance d'un vaste public, contrairement aux guitaristes pré-cités.

Holdsworth possède un style totalement unique, qui provient du fait qu'il est un autodidacte complet, le seul professeur de musique qu'il ait jamais eu ayant été son père, qui était pianiste (pas guitariste). Holdsworth, lui, a manifesté très tôt une sensibilité exceptionnelle à la musique, et en particulier à la sonorité du saxophone. Ses parents, n'ayant pas les moyens de lui offrir cet instrument, lui achetèrent une guitare quand il avait 16 ans, après avoir tâté du piano avec son père, mais il détestait l'approche percussive des touches, il voulait caresser les notes d'un cuivre ou d'un violon.

Holdsworth revendique être un saxophoniste frustré, et a développé très jeune une technique lui permettant de se rapprocher inconsciemment de la fluidité du sax : le legato, qui consiste à n'attaquer qu'une note par corde, toutes les autres étant générées uniquement par la main gauche ("frappées", donc par les doigts de la main gauche, sans être attaquées au médiator de la main droite). Joe Satriani, guitar-hero ayant popularisé cette technique, avoue avoir été fortement inspiré par Holdsworth pour son apprentissage de cette technique.

Ce dernier a néanmoins développé la beauté du legato à l'extrême, car il reconnaît chercher le jeu le plus propre et le plus intelligible possible, en évitant tout "bruit" entre les notes, en particulier celui dû à la distorsion, qu'il abhorre mais avec laquelle il est obligé de composer afin d'avoir assez de sustain. Il a réussi à faire en sorte que les notes "frappées" de la main gauche sonne même plus fort que celles attaquées, résultat : Holdsworth peut mélanger notes attaquées et notes frappées pour arriver à un phrasé d'une pureté sans aucune comparaison possible. Ses envolées sont comparables à celles de John Coltrane, dont Holdsworth est tombé fou amoureux en écoutant les disques de Miles Davis.

Holdsworth possède en outre une approche assez mathématique pour assimiler la position des notes de la gamme qu'il veut utiliser sur le manche. Il considère le manche comme un graphique lui permettant de répertorier les modes sous forme de nombres. Une fois assimilé toutes les permutations possibles, il a choisi celles qui lui serviraient vraiment par rapport à leur potentiel harmonique.

Ceci lui a permis notamment de développer la deuxième grande caractéristique technique de son jeu : des accords enrichis et hyper harmonisés que l’on ne trouve dans aucun livre de guitare (remplis de secondes, sixtes, onzièmes, etc), qui ne se jouent qu'avec de grands écarts de doigts, et qui laissent perplexes même ceux disposant de mains de taille généreuse.

Et la musique dans tout ça ? Son génie guitaristique côtoie en effet un goût parfois contestable du style de composition jazz-rock clean et sophistiqué, d'où la tendance de nombreux critiques à le considérer comme une sorte de dinosaure du jazz-rock, dans ce qu'il a pu produire de plus éculé. Son goût prononcé pour la théorie et la recherche rendent parfois l'approche de ses disques assez aride, mais ceci n'enlève rien à la phénoménale inventivité mélodique du guitariste.

Le parcours discographique parle pour lui de toute façon : Soft Machine, Lifetime (de feu Tony Williams), U.K., Gong, Jean-Luc Ponty, Stanley Clarke, Bill Bruford... Et les musiciens figurant sur ses nombreux albums solo constituent une dream team à n'en plus finir (recommandons en particulier Metal Fatigue, 1985).

Quid de la formation de ce concert totalement exceptionnel au New Morning ? Encore une dream team, mais inédite. Chad Wakerman aux fûts (excusez du peu) n'est néanmoins pas une nouveauté puisqu'il apparaît sur de nombreux disques aux côtés d'Holdsworth. Par contre, l'idée de génie est d'avoir complété la section rythmique par Jimmy Haslip, solide bassiste jazz-rock lyrique apparaissant sur une quantité innombrable de disques, dont pas mal flirtant plutôt avec le rock voire hard-rock, ou encore la pop (en vrac, Alcatrazz, Jimmy Barnes, Andy Summers, Cher, Jon Anderson...). La cohésion de cette section était à couper le souffle ; du coup, les deux solistes n'avaient plus qu'à dérouler le tapis... La deuxième grande découverte de la soirée étant le claviériste Alan Pasqua, avec qui Holdsworth avait collaboré au sein de Lifetime dans les 70's. Le fameux titre Proto-Cosmos de l'album Believe It (1975) fut d'ailleurs joué ce soir là.

Alan Pasqua n'est pas un cousin de notre Charles national, mais est américain ; c’est en fait un incontournable claviériste des studios de Los Angeles : les stars du rock, de la pop, de la soul et du jazz se l’arrachent. Son expressivité provient d'une l'utilisation hors normes d'un clavier Nord Lead Stage 88, dont il tire des sons électriques fortement filtrés, légèrement désaccordés ou saturés. Au final, il formait un contraste très réussi avec les envolées holdsworthiennes très polissées. Aucun ne prenait le lead sur l'autre d'ailleurs, et bien souvent Holdsworth n'accompagnait pas Pasqua lorsqu'il partait en solo.

Mieux qu'un long discours, quelques minutes du concert ont été mises en ligne sur You Tube ici. Malgré le son légèrement saturé, ne ratez pas le solo de Pasqua vers 3'00. Pour admirer brièvement la technique et le son de Holdsworth, mieux vaut se reporter sur cet extrait du DVD disponible de cette formation.

Malgré le très haut niveau, on peut ressentir une légère frustration avec la prestation d'Holdsworth, qui, aussi bonne fut-elle, a manqué d'une dose de magie ou de points culminants pour égaler la prestation plus enflammée d'Alan Pasqua. De lui-même, Holdsworth a avoué à la fin à quelques aficionados restés pour le rencontrer qu'il n'avait pas été content du son dans ses retours (il s'en est plaint au micro à l'attention de l'ingénier du son d'ailleurs), et que cela l'avait irrité au point de lui gâcher le plaisir de jouer. Ce qui s'est forcément répercuté sur la qualité de son jeu, resté assez uniforme d'un point de vue harmonique.

Espérons que la prochaine fois, Holdsworth déchirera tout... même s'il était déjà bien haut ! Un des meilleurs concerts vus au New Morning en tout cas, pour ma part.

17:10 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : holdsworth, concert