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11 juin 2007

INXS, Festival Montereau Confluences, 08/06/2007



La dernière (et première fois) fois que j'avais vu INXS, c'était le 10 juin 1993 à Bordeaux, soit 14 ans quasiment jour pour jour. Ce concert restera à jamais gravé dans ma mémoire ; non seulement INXS était mon groupe préféré, mais en plus, Michael Hutchence reste encore aujourd'hui le plus fantastique et sensuel frontman que j'ai pu voir sur scène.

Suite à deux tournées marathon pour les albums qui les avaient installés au faîte de la gloire internationale (Kick en 1987 et X en 1990), INXS avait intelligemment décidé d'expérimenter en sortant un album très réussi artistiquement (Welcome To Wherever You Are, 1992), suivi d'une tournée de clubs ou de "petites" salles, le groupe étant vraiment las des stades et autres arènes.

Ceci permit donc de voir INXS dans d'excellentes conditions, et la Médoquine de Bordeaux fut investie notamment par bon nombre de lycéens pas intimidés à l'idée de faire la fête à la veille de l'épreuve de philo du bac 1993. La salle fut transformée en dancefloor où le public resortit éreinté et quasiment en transe ! Pour ceux qui ont vu la vidéo Live Baby Live du concert de juillet 1991 au Wembley Stadium devant 90 000 personnes, imaginez la même ferveur dans une petite salle surchauffée...

INXS n'avait pas remis les pieds en France depuis le 1er juillet 1997 (Paris, Zénith), Hutchence étant décédé quelques mois plus tard (novembre 1997). Le groupe n'est pas resté pour autant inactif et a repris en 2000 le chemin des concerts avec Jon Stevens (ex-Noiseworks) au chant, pour quelques tournées dont la seule en Europe (Just For Kicks) remonte à 2003 (sans passage par la France). Néanmoins, on attendait toujours un album...

C'est de manière très improbable qu'INXS a donc retrouvé un chanteur : grâce à l'émission américaine Rock Star, qui a permis d'auditionner des prétendants à la mission a priori impossible, succéder à Michael Hutchence. Miracle : le vainqueur, le Canadien J.D. Fortune, possède des qualités que même le groupe n'aurait sans doute pas espéré au départ. Le nouvel album, Switch, sorti fin 2005 (mais plus d'un an après en France, sans aucun travail de promo), confirmait tous les espoirs placés en Fortune : non seulement il ne cherchait pas à "remplacer" Hutchence, mais il ne dénaturait pas le son du groupe, au contraire ; il y contribuait en se montrant fin parolier (ce qu'était aussi Hutchence). C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles Fortune emporta le concours, car INXS avait proposé aux prétendants d'écrire les paroles et mélodies vocales d'un titre composé par leurs soins, et la version de Fortune était de loin la meilleure, ce qui donna le single Pretty Vegas qui fit un carton aux USA et au Canada.

Il restait donc à voir ce que INXS 2.0 allait donner sur scène. Présent de manière un peu inattendue au festival de Montereau Confluences (à 100 km de Paris), le groupe assurait la tête d'affiche du vendredi soir. Après Michel Delpech et Axelle Red, il n'est pas exagéré d'écrire qu'INXS, en débutant son set par Suicide Blonde, a légèrement décoiffé le public un peu sage constitué en majorité de familles tranquilles. Disposant de leur propre rampe de lights, et de leur propre ingénieur du son, la différence de qualité technique était sensible. Et quelle puissance ! En quelques chansons, le public était dans la poche, et pourtant INXS n'a pas joué la carte de la setlist "best-of" puisque pas moins de 7 titres (sur 11) du dernier album furent joués ! La setlist ne fut donc pas adaptée pour le festival, et INXS laissa même de côté leur premier tube international, Original Sin.

Le plus gros atout sur scène d'INXS 2.0, c'est sans doute finalement le même (toutes proportions gardées) que celui de la version 1.0... son chanteur ! Car J.D. Fortune est un sacré entertainer qui sait vraiment aller chercher le public, le faire réagir, et il est de surcroît un interprète à la fois juste et très énergique. Arpentant inlassablement l'immense scène du festival, Fortune a su conquérir peu à peu les 6000 spectateurs du festival. Kirk Pengilly et Tim Farriss n'étant pas en reste au niveau de l'occupation de l'espace. Beau set de 1h30, 17 titres, pour un show sans aucune faille : de superbes retrouvailles qui me firent vraiment chaud au coeur ! Voilà qui augurait bien du concert parisien du lendemain, dans une toute autre configuration : la Cigale (1500 places). A suivre dans une prochaine note...

Setlist

Suicide Blonde
Devil's Party
Mystify
Hot Girls
Disappear
By My Side
Afterglow
Hungry
Never Let You Go
Need You Tonight
What You Need
Folsom Prison (Johnny Cash)
Devil Inside
Pretty Vegas

Rappel:
God's Top Ten
New Sensation
Never Tear Us Apart
Don't Change

17:00 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : INXS, concert

10 juin 2007

Death Proof



Passons sur la traduction peu heureuse de "Boulevard de la Mort", qui fait perdre totalement le jeu de mot futé du titre original, qui avait le mérite d'annoncer la couleur. Death Proof est le 6ème long-métrage de Quentin Tarantino, et c'est un événement en soi. Annoncé comme un film "mineur", presque comme une recréation de luxe pour le cinéaste, il n'en reste pas moins une oeuvre dont tous les signaux annonçaient un film très spécial.

Afin de rendre hommage aux films de séries B qui les ont bercés, Tarantino et son complice Robert Rodriguez ont décidé en effet de tourner Grindhouse, un double-programme identique à ceux diffusés dans le cadre des systèmes d'exploitation Grindhouse (salles qui projetaient des doubles programmes déjantés entrecoupés de bandes annonces). Les deux films nés de cette association empruntent aux genres populaires de cette époque : Planet Terror de Robert Rodriguez est un film de zombie (à voir chez nous en septembre), tandis que Death Proof est un "slasher road movie".

Hélas, le concept du double-programme entrecoupé d'un entracte, parfaitement en phase avec le système d'exploitation US, a été jugé inhabituel pour les pays européens par la production du film et n'a pas passé les frontières américaines. Les frères Weinstein, producteurs du projet, ont décidé que le film serait coupé en deux pour tous les pays non-anglophones, et que chaque partie serait allongée pour un faire un film un peu plus long que les 75mn initiales de chaque partie.

C'est ainsi que Death Proof, en Europe, sort dans une version "longue" de 1h45, soit un quart d'heure en plus par rapport à la version US. Tant mieux (pour cette version plus longue), ou tant pis (de ne pas avoir le projet Grindhouse en salles tel qu'il a été imaginé) ? De toute façon, nous nous rattraperons en DVD, qui proposera sans doute toutes les versions.

Tarantino a déjà saturé tous ses films précédents de clins d'œil à tous les films de genre dont il raffole. L'exercice consistant à tourner lui-même une pure série B ne pouvait donc qu'aboutir à un film complètement fou et excessif. Hélas, ce n'est pas exactement ce qu'est Death Proof. Plaisir coupable parfois jouissif, parfois pénible, Death Proof est une crétinerie drôle, mais vaniteuse car trop sûre de ses effets. C'est donc un objet filmique vraiment unique, destiné uniquement, et vraiment uniquement, à se faire plaisir (pour Tarantino), et tenter de faire plaisir aux nostalgiques de ces bons vieux slashers fauchés.

Néanmoins, Tarantino ne fait pas que parodier et rendre hommage aux séries B qui ont bercé son adolescence ; il se parodie lui-même délibérément, en jouant ainsi avec la patience du spectateur. Les dialogues à propos de sujets populaires, d'apparence futiles, est une des marques de fabrique de Tarantino. Mais l'anecdotique est amusant dans la mesure où il touche le spectateur. Or, dans Death Proof, ces dialogues sont parfois étirés jusqu'à l'absurde, et finissent par être insupportables car ils sombrent dans des sujets de la plus totale médiocrité. On sent ici un vrai manque de recul ou de clairvoyance dans l'écriture, qui trahit probablement un péché de vanité. Le spectateur crève d'envie que l'action reprenne son cours, ce qui agit comme une délivrance très intense quand le slasher reprend son droit. Death Proof ne remplit donc pas totalement, loin s'en faut, le programme annoncé de Grindhouse, ce qui risque de faire des déçus, y compris dans le rang des fans.

Tarantino se moque toutefois d'emblée de ses détracteurs qui lui reprocheront de se contenter parfois de se contenter de faire du Tarantino, comme cette sonnerie de portable estampillée Kill Bill émanant d'un des téléphones des personnages, ou cette séquence où on retrouve les Texas rangers père et fils de Kill Bill 1. Cette crânerie ne masque pas ses pannes d'inspiration, réelles, comme la scène de lap dance qui cherche vainement à recréer l'effet culte de la scène de danse de Pulp Fiction, et qui n'est pas du tout à la hauteur du talent du cinéaste.

Death Proof est donc clairement un point bas dans la filmographie de Tarantino, qui semble avoir pris le melon avec le succès critique et public des deux Kill Bill, œuvre hautement aboutie en comparaison. Même en version originale de 90mn (telle que projetée aux USA dans la cadre du programme Grindhouse avec Planet Terror), Death Proof est un film déséquilibré, inconstant, sauvé toutefois par les éclairs de génie de mise en scène d'un des cinéastes américains les plus fascinants, même dans un semi-échec comme ici. Preuve qu'il y a un os, la bande-originale du film n'est pas aussi surprenante que d'habitude. C'est bon, mais c'est sans surprise.

7/10

09:25 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, tarantino

24 mai 2007

Allan Holdsworth, New Morning, 22/05/2007



Je ne suis pas parvenu à retrouver avec certitude à quand remonte le dernier passage d'Holdsworth à Paris mais il semblerait que c'était en 1997. Depuis que j'ai découvert le bonhomme en 1993, quand j'en étais seulement à un an d'apprentissage de la guitare, je rêvais (comme beaucoup) de le voir. C'est fait : amen !

Allan Holdsworth est le guitariste des guitaristes ; la plupart des plus grands sont en effet unanimes pour déclarer qu'il est l'un des plus grands virtuoses de l'instrument et qu'il constitue pour eux une référence absolue. Frank Zappa, s'il ne devait retenir deux noms de guitaristes, répondait : Hendrix et Holdsworth. Dans le "best-of" d'Holdsworth, Against The Clock (2005), le livret offre pléthore de citations provenant d'autres légendes de la guitare.

Eddie Van Halen : "Holdsworth is the best in my book. He's fantastic. I love him...What I can do on two hands, he can do with one".

John McLaughlin : "I've known Allan Holdsworth and his music for 30 years now, and after all this time, he's still amazes me. His concept is still advancing with his playing, and his technical prowess which is phenomenal, is in complete harmony with his musical direction. And this is a very advanced direction" .

Inutile de prolonger la liste, mais sachez que la palanquée des "shredders" comme Steve Vai, Joe Satriani ou Yngwie Malmsteen sont également en extase devant Holdsworth. C'est d'autant plus frappant que Holdsworth, lui, n'a jamais connu les grâces de la reconnaissance d'un vaste public, contrairement aux guitaristes pré-cités.

Holdsworth possède un style totalement unique, qui provient du fait qu'il est un autodidacte complet, le seul professeur de musique qu'il ait jamais eu ayant été son père, qui était pianiste (pas guitariste). Holdsworth, lui, a manifesté très tôt une sensibilité exceptionnelle à la musique, et en particulier à la sonorité du saxophone. Ses parents, n'ayant pas les moyens de lui offrir cet instrument, lui achetèrent une guitare quand il avait 16 ans, après avoir tâté du piano avec son père, mais il détestait l'approche percussive des touches, il voulait caresser les notes d'un cuivre ou d'un violon.

Holdsworth revendique être un saxophoniste frustré, et a développé très jeune une technique lui permettant de se rapprocher inconsciemment de la fluidité du sax : le legato, qui consiste à n'attaquer qu'une note par corde, toutes les autres étant générées uniquement par la main gauche ("frappées", donc par les doigts de la main gauche, sans être attaquées au médiator de la main droite). Joe Satriani, guitar-hero ayant popularisé cette technique, avoue avoir été fortement inspiré par Holdsworth pour son apprentissage de cette technique.

Ce dernier a néanmoins développé la beauté du legato à l'extrême, car il reconnaît chercher le jeu le plus propre et le plus intelligible possible, en évitant tout "bruit" entre les notes, en particulier celui dû à la distorsion, qu'il abhorre mais avec laquelle il est obligé de composer afin d'avoir assez de sustain. Il a réussi à faire en sorte que les notes "frappées" de la main gauche sonne même plus fort que celles attaquées, résultat : Holdsworth peut mélanger notes attaquées et notes frappées pour arriver à un phrasé d'une pureté sans aucune comparaison possible. Ses envolées sont comparables à celles de John Coltrane, dont Holdsworth est tombé fou amoureux en écoutant les disques de Miles Davis.

Holdsworth possède en outre une approche assez mathématique pour assimiler la position des notes de la gamme qu'il veut utiliser sur le manche. Il considère le manche comme un graphique lui permettant de répertorier les modes sous forme de nombres. Une fois assimilé toutes les permutations possibles, il a choisi celles qui lui serviraient vraiment par rapport à leur potentiel harmonique.

Ceci lui a permis notamment de développer la deuxième grande caractéristique technique de son jeu : des accords enrichis et hyper harmonisés que l’on ne trouve dans aucun livre de guitare (remplis de secondes, sixtes, onzièmes, etc), qui ne se jouent qu'avec de grands écarts de doigts, et qui laissent perplexes même ceux disposant de mains de taille généreuse.

Et la musique dans tout ça ? Son génie guitaristique côtoie en effet un goût parfois contestable du style de composition jazz-rock clean et sophistiqué, d'où la tendance de nombreux critiques à le considérer comme une sorte de dinosaure du jazz-rock, dans ce qu'il a pu produire de plus éculé. Son goût prononcé pour la théorie et la recherche rendent parfois l'approche de ses disques assez aride, mais ceci n'enlève rien à la phénoménale inventivité mélodique du guitariste.

Le parcours discographique parle pour lui de toute façon : Soft Machine, Lifetime (de feu Tony Williams), U.K., Gong, Jean-Luc Ponty, Stanley Clarke, Bill Bruford... Et les musiciens figurant sur ses nombreux albums solo constituent une dream team à n'en plus finir (recommandons en particulier Metal Fatigue, 1985).

Quid de la formation de ce concert totalement exceptionnel au New Morning ? Encore une dream team, mais inédite. Chad Wakerman aux fûts (excusez du peu) n'est néanmoins pas une nouveauté puisqu'il apparaît sur de nombreux disques aux côtés d'Holdsworth. Par contre, l'idée de génie est d'avoir complété la section rythmique par Jimmy Haslip, solide bassiste jazz-rock lyrique apparaissant sur une quantité innombrable de disques, dont pas mal flirtant plutôt avec le rock voire hard-rock, ou encore la pop (en vrac, Alcatrazz, Jimmy Barnes, Andy Summers, Cher, Jon Anderson...). La cohésion de cette section était à couper le souffle ; du coup, les deux solistes n'avaient plus qu'à dérouler le tapis... La deuxième grande découverte de la soirée étant le claviériste Alan Pasqua, avec qui Holdsworth avait collaboré au sein de Lifetime dans les 70's. Le fameux titre Proto-Cosmos de l'album Believe It (1975) fut d'ailleurs joué ce soir là.

Alan Pasqua n'est pas un cousin de notre Charles national, mais est américain ; c’est en fait un incontournable claviériste des studios de Los Angeles : les stars du rock, de la pop, de la soul et du jazz se l’arrachent. Son expressivité provient d'une l'utilisation hors normes d'un clavier Nord Lead Stage 88, dont il tire des sons électriques fortement filtrés, légèrement désaccordés ou saturés. Au final, il formait un contraste très réussi avec les envolées holdsworthiennes très polissées. Aucun ne prenait le lead sur l'autre d'ailleurs, et bien souvent Holdsworth n'accompagnait pas Pasqua lorsqu'il partait en solo.

Mieux qu'un long discours, quelques minutes du concert ont été mises en ligne sur You Tube ici. Malgré le son légèrement saturé, ne ratez pas le solo de Pasqua vers 3'00. Pour admirer brièvement la technique et le son de Holdsworth, mieux vaut se reporter sur cet extrait du DVD disponible de cette formation.

Malgré le très haut niveau, on peut ressentir une légère frustration avec la prestation d'Holdsworth, qui, aussi bonne fut-elle, a manqué d'une dose de magie ou de points culminants pour égaler la prestation plus enflammée d'Alan Pasqua. De lui-même, Holdsworth a avoué à la fin à quelques aficionados restés pour le rencontrer qu'il n'avait pas été content du son dans ses retours (il s'en est plaint au micro à l'attention de l'ingénier du son d'ailleurs), et que cela l'avait irrité au point de lui gâcher le plaisir de jouer. Ce qui s'est forcément répercuté sur la qualité de son jeu, resté assez uniforme d'un point de vue harmonique.

Espérons que la prochaine fois, Holdsworth déchirera tout... même s'il était déjà bien haut ! Un des meilleurs concerts vus au New Morning en tout cas, pour ma part.

17:10 Publié dans Concerts | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : holdsworth, concert

21 mai 2007

Zodiac



La filmographie de Fincher se résume à 6 longs-métrages depuis 1992 que n'importe quel cinéphile doit pouvoir citer de tête : Alien 3, Seven, The Game, Fight Club, Panic Room, et désormais Zodiac. Bien que Fincher n'ait pas participé à un seul des scénarii de ses réalisations, il a toujours su choisir avec soin ses projets, sauf pour Panic Room qui ressemble au final à une aimable commande. Pas un mauvais thriller en soi, mais qui ne tient certes pas la comparaison avec le reste.

Comme il s'est écoulé presque 5 ans depuis cette semi-déception en provenance d'un cinéaste américain des plus doués, l'attente était donc grande. Fincher pouvait jusqu'alors passer pour un Monsieur "je t'en mets plein la vue" ; Zodiac est désormais la preuve que Fincher a mûri et signe son premier film totalement maîtrisé, sous son aspect faussement sobre. Maîtrise absolue, c'est bien l'impression dégagée par ce film (ni tout à fait polar, et si peu thriller) de 2h30 (qu'on ne voit guère passer), dans lequel on ne trouvera aucune tentative d'épate, sans être toutefois dénué de coups d'éclats terrassants (la mise en scène stupéfiante des meurtres, filmés systématiquement du point de vue de la victime).

Fincher filme avant tout l'obsession de trois personnages décidés à trouver qui se cache derrière ce meurtrier qui se fait appeler le Zodiac. Cette obsession court sur plus de trois décennies (cette quête usant littéralement ses protagonistes), ère que Fincher nous fait traverser avec un sens ultra aigu du découpage, tel un documentaire. Grâce à cela, il imprime un rythme inversement passionnant à la banalité qui va recouvrir cette enquête, qui se dirigera vers un oubli quasi-mortifère.

On pourrait s'attarder longuement sur le casting futé et l'excellence des comédiens (sacré Mark Ruffalo, déjà flic dans Collateral de Michael Mann), l'extraordinaire travail de reconstitution des années 70 en particulier, ou sur la photo à tomber de Harris Sevides (qui avait déjà signé celle de The Game), voire sur l'excellence du sound design et du mixage surround de la bande-son.

Fincher signe un sans-faute à tous les niveaux, mais il est probable que sa volonté de sobriété et l'extrême frustration dégagée par ce cas tout à fait réel ne condamne le film qu'à un succès d'estime (peut-être avec une récompense à Cannes ?). En tout cas, ça fait du bien de voir qu'il est encore possible de produire de tels films hollywoodiens qui assurément, ne feront pas un carton au box-office. Une leçon de cinéma adulte, brillant, qui sacrifie le suspense au sens classique du terme, et qui pourtant s'exhibe comme un monument de mise en scène. Du Cinéma, avec un grand C.

9/10

22:39 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : Cinéma

18 mai 2007

Spider-Man 3



Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se casse... Le proverbe s'applique bien aux trilogies de super-héros : Batman, X-Men, et à présent Spider-Man. L'épisode de trop ? Oui, mais pas pour les mêmes raisons que ses prédécesseurs, pour lesquels le capitaine (respectivement, les réalisateurs Tim Burton et Bryan Singer) s'était vu remplacé par un faiseur de nanars (respectivement, Joel Schumacher et Brett Ratner). Pour Spider-Man 3, Sam Raimi est resté aux commandes, donc le naufrage est évité, mais ce troisème opus est victime d'une tendance lourde : le trop est l'ennemi du bien. Résultat, le dernier (?) volet de Spider-Man est un gros objet boursouflé malgré d'indéniables qualités.

Long, beaucoup trop long : ce film de 2h20 propose des scènes hélas bien lâches entre elles, au parfum désagréable de passages obligés, à cause d'un scénario qui tente de caser trop d'arcs pour qu'ils soient explorés tous avec assez de profondeur. Spider-Man / Peter Parker a tout un tas de soucis sur le dos : Harry Osborn veut toujours le tuer, une météorite avec une matière vivante inquiétante tombe du ciel, le meurtrier de son oncle s'évade et devient un mutant qui veut tout détruire, Mary Jane se fait virer de sa première comédie musicale et redevient serveuse, et enfin on tente de lui prendre sa place de photographe reporter au journal !

La force des deux premiers volets de Spider-Man tenait dans l'illustration d'une thématique bien précise : découverte des super-pouvoirs, puis réflexion sur la responsabilité de leur usage, avec le lot de sacrifices qui vont avec. Dans Spider-Man 3, on sent bien que Sam Raimi est toujours très intéressé par l'exploration de la personnalité du héros. L'artifice d'une matière vivante venue de l'espace décuplant le côté sombre de Parker était un matériau de premier ordre. Hélas, cette piste n'est que survolée (et tant pis pour la promesse alléchante figurant sur l'affiche même), même si elle donne lieu à des scènes parmi les plus réjouissantes du film (celle de la danse dans le pub).

Pression des producteurs ? Spider-Man 3 perd l'originalité des épisodes précédents, qui limitaient l'action pour mieux la mettre en valeur quand elle arrivait pour des scènes anthologiques. Cette fois, de l'action estampillée blockbuster pur jus, il y en a pléthore, au point de la vider de tout caractère dramatique malgré le talent toujours époustouflant de mise en scène de Raimi. C'est ce qu'on appelle gâcher son talent... Les amateurs de cinéma pop-corn n'ont que faire des étâts d'âme de Peter Parker ? Pas de problème, les vannes à cascades et effets spéciaux sont ouvertes. Et visiblement, ça marche ! CQFD.

6/10

18:47 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Cinéma