30 janvier 2010
A Serious Man
Luttant désespérément pour trouver un équilibre alors que les ennuis s'accumulent autour de lui, Larry cherche conseil auprès de trois rabbins. Qui l'aidera à faire face à ses malheurs et à devenir un mensch, un homme bien ?
14e long-métrage (si je ne m'abuse), déjà, pour les frangins Coen qui semblent pris de frénésie depuis le break commencé en 2004 après l'anecdotique Ladykillers et rompu avec No Country For Old Men en 2008. Ils en sont désormais à un film par an, comme Woody Allen. La livraison de l'an dernier, Burn After Reading, ayant témoigné d'une sérieuse baisse dans la qualité, il y avait de quoi être inquiet. Un film par an, c'est impressionnant de productivité, mais quid de la qualité ?
Heureusement, les Coen montrent qu'ils sont finalement toujours des auteurs affûtés quand ils le veulent bien (No Country était une adaptation de roman, Ladykillers était un remake, et Burn After Reading une gentille pochade peu rassurante sur leur capacité à écrire un scénario original digne de ce nom). A Serious Man fourmille de dialogues et de situations diablement réjouissants, qu'ils savent en outre mettre en scène avec un brio qui n'appartiennent qu'à eux. Le savoir-faire est admirable de bout en bout, c'est un pur régal de cinéphile.
Néanmoins, le film se trouve limité par son postulat de départ (l'humour juif à 200%), et par le manque de fil conducteur, ou du moins d'enjeu. Non, la vie n'a guère de sens... et est souvent absurde. Ce constat, décliné pendant 1h45, finit par être tout de même un poil longuet malgré l'excellence de la très grande plupart des scènes prises individuellement.
7/10
20:13 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, joel coen, ethan coen, michael stuhlbarg, sari lennick, richard kind
16 janvier 2010
Agora
IVème siècle après Jésus-Christ. L'Egypte est sous domination romaine. A Alexandrie, la révolte des Chrétiens gronde. Réfugiée dans la grande Bibliothèque, désormais menacée par la colère des insurgés, la brillante astronome Hypatie tente de préserver les connaissances accumulées depuis des siècles, avec l'aide de ses disciples. Parmi eux, deux hommes se disputent l'amour d'Hypatie : Oreste et le jeune esclave Davus, déchiré entre ses sentiments et la perspective d'être affranchi s'il accepte de rejoindre les Chrétiens, de plus en plus puissants...
Il est difficile de devoir reconnaître que l'un des tout meilleurs cinéastes espagnols, Alejandro Amenábar, a commis son premier faux pas avec Agora, son 5e long-métrage. C'est d'autant plus décevant qu'il a fallu attendre plus de 4 ans après Mar Adentro (drame d'un équilibre magistral sur l'euthanasie), pour aboutir à ce constat. Non pas que Agora soit foncièrement mauvais, ça reste bien entendu a minima une entreprise intéressante. Ce projet de peplum intellectuel, voire métaphysique, était ambitieux et c'est tout à son honneur que d'avoir tenté de revisiter un genre aussi casse-gueule, d'autant plus qu'il en assume le scénario. Seul responsable, donc.
Amenábar a péché surtout par orgueil, en tentant d'embrasser beaucoup trop de thématiques. Le film s'éparpille donc entre cours d'Histoire, plaidoyer féministe, batailles épiques, joutes politico-religieuses, et histoire d'amour. Rachel Weisz a beau être exemplaire dans le rôle principal de l'astronome et philosophe Hypatie, l'ennui finit par poindre bien avant la fin des deux grosses heures que dure cette fresque qui mixe trop d'ingrédients au point d'en être indigeste. Ce n'est pas tout : la photo et la théâtralité qui ressortent d'Agora ont tendance hélas à lui donner un côté téléfilm de luxe qui finira sans doute de balayer les doutes d'un possible "grand film incompris".
Le principal intérêt d'Agora est finalement son manisfeste athéiste, les chrétiens et les juifs étant renvoyés dos à dos quant à leur fanatisme qui sacrifie tout progrès au profit de l'extension de leur pouvoir. C'est un peu court sur deux heures, et on attend mieux la prochaine fois.
6/10
18:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alejandro amenábar, rachel weisz, max minghella, oscar isaac
10 janvier 2010
La Merditude des Choses
Synopsis : Gunther Strobbe a 13 ans et une vie compliquée. Le jeune garçon partage le toit de sa grand-mère avec son père et ses trois oncles. Quotidiennement, il baigne dans un climat de beuveries effrénées, de drague éhontée et de glande constante... Tout porte à croire qu'il subira le même sort, a moins qu'il ne parvienne à se "démerder" de là...
Le Flamand Felix Van Groeningen réussit un équilibre improbable entre le drame social et la comédie, et accomplit du même coup une fusion du réalisme des frères Dardenne et du décalage des frères Coen. Le film, au-delà du paroxysme de l'énormité des situations (mais la réalité doit être pire encore dans ces villages où il n'y a rien à faire à part boire), fait finalement frémir quant aux conséquences croisées de l'oisiveté, du manque d'éducation et de l'absence de culture.
8/10
22:07 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, felix van groeningen, johan heldenbergh, koen de graeve, pauline grossen
31 décembre 2009
Max et les maximonstres
Adapté du livre pour enfants de Maurice Sendak, Where The Wild Things Are (traduit pauvrement en Max et les maximonstres pour l'exploitation française) raconte l'histoire de Max, un garçon de 9 ans hyperactif et hypersensible, qui exaspère sa mère. Après une grosse dispute, Max s'enfuit et va créer son propre monde, une forêt habitée par des créatures sauvages et féroces le couronnant comme leur roi.
Le réalisateur, Spike Jonze, initialement plébiscité grâce à ses clips (un peu comme Michel Gondry), a été parachuté prodige du cinéma branché avec le surréaliste Dans la peau de John Malkovich (1999). Depuis il n'avait réalisé qu'un seul long-métrage, Adaptation (2002), et ensuite, plus rien. Il était difficile d'imaginer que Jonze allait revenir autant d'années plus tard avec une telle progression.
Max et les maximonstres a suscité des critiques totalement antagonistes, signe qu'il y a bien là quelque chose de foncièrement intéressant. L'explication des nombreux pour/contre vus dans la presse est simple : il est difficile de cerner à qui ce film s'adresse. Et la réponse est probablement : à personne en particulier, mais en tout cas surtout pas aux enfants. Ce qui n'est pas conventionnel, mais finalement à l'image du film : esthétiquement superbe, mais à l'histoire indéniablement troublante et parfois carrément dérangeante. Jonze n'hésite pas à sortir le spectateur hors de sa zone de confort, et le fait qu'il pose sa caméra systématiquement à hauteur d'enfant amplifie largement cet effet pour les spectateurs adultes.
Si on y ajoute que le scénario souffre de certaines longueurs qui amoindrissent de ce récit sur l'enfance et ses complexités, on comprend mieux qu'il y ait des réserves. Néanmoins, le film a les qualités de ses défauts ! Comme l'écrit très justement Filmsactu.com : "Bercé par une poésie visuelle palpable à chaque plan, Max et les Maximonstres saisit tout le potentiel dramatique et onirique du conte de Maurice Sendak pour délivrer une vision sans concession de l'enfance, à travers ses moments d'insouciance mais aussi ses peurs, ses blessures. Evitant le cliché de dégager une morale claire et définie comme l'aurait fait un Disney, Spike Jonze projette le spectateur dans le tourbillon des émotions changeantes de Max, avec une énergie et un grain de folie libérateurs".
Pour terminer, il faut préciser que les monstres prennent vie à l'écran de façon très organique : ici, pas de créatures animées à la palette graphique, mais place au charme suranné d'acteurs costumés et d'animatronics, avec l'efficacité de la précision numérique pour amplifier la palette d'émotions des visages. A l'heure de l'invasion des avatars, ce pari visuel est osé, et sans paraître rétrograde, on a le droit de trouver que ça a fichtrement une toute autre âme que le tout numérique.
8/10
23:01 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, spike jonze, max records, catherine keener
29 décembre 2009
The Proposition
La sortie internationale du décevant The Road aura eu moins le mérite de permettre au film précédent de l'Australien John Hillcoat, The Proposition (datant de 2005 !), de sortir sur nos écrans.
Et il aurait été bien dommage que The Proposition reste inédit en salles chez nous. A la vision de ce western foncièrement réussi, on comprend mieux pourquoi John Hillcoat s'était vu proposer le projet hollywoodien de The Road, dans lequel hélas sa personnalité de metteur en scène est estompée. Dans The Proposition, on découvre un cinéaste doué et original, qui avait entrepris une démarche inédite : réaliser un western australien situé dans l'outback, mettant en scène le conflit avec les aborigènes, les bushrangers, etc.
C'est Nick Cave, le songwriter australien bien connu, qui a signé le scénario, et il faut avouer que même si le drame shakespearien qui constitue l'épine dorsale du film est classique, tout ce qui vient se greffer autour contribue vraiment à faire de The Proposition un western de facture totalement inédite, et passionnant.
Comme le dit Nick Cave, "les personnages indigènes de The Proposition ne font pas partie du simple décor, ils sont essentiels au climat parfois mystique du film, et constituent un lien ambivalent entre les deux camps qui s'affrontent ici : les bandits et la loi. Qu'ils soient violemment écrasés par la domination des Blancs ou contraints à accepter la soumission qu'on leur impose, ils demeurent tous animés par un esprit de rébellion contenu, mais inébranlable".
8/10
11:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, john hillcoat, guy pearce, emily watson, ray winstone