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04 avril 2006

El Aura



Voici peut-être LA pépite des films sortis en mars (mois très creux à mon avis) : le deuxième film de l'Argentin Fabián Bielinsky (probable futur prodige à continuer de surveiller de près), après le succès assez impressionnant de son premier long-métrage, Les Neuf Reines (Nueve Reinas, 2000), qui avait finit par sortir sur nos écrans en 2002 après une tournée fructueuse en récompenses des divers festivals du monde (ce qui n'a pas manqué d'attirer l'attention des Américains pour en faire un médiocre remake, Criminal, en 2004).

Nueve Reinas était un brillant exercice de style sur la manipulation, dans la lignée de films mémorables comme Memento, Usual Suspects ou encore The Game. Si le scénario était indéniablement malin, avec énormément de dialogues, la mise en scène était prometteuse par sa vivacité et sa virtuosité qui n'était pas sans me rappeler celle de Brian De Palma.

C'est cette référence qui me vient le plus à l'esprit pour la cinématographie de El Aura, qui prend néanmoins un virage total par rapport à Nueve Reinas : économie de dialogues, mélange de genres (thriller, polar, drame social...), changement total de cadre (nature splendide cette fois, à l'opposé du cadre citadin des Neufs Reines, et utilisation extrêmement intelligente des animaux dans le film ; le personnage principal étant taxidermiste, ce qu'exploite savamment Bielinsky). On retrouve néanmoins par moments, lors des rares scènes d'action, la fulgurance des Neufs Reines ; mais dans l'ensemble, le film entretient une tension constante, étouffante, et met en place un puzzle de façon lente, sans doute trop lente pour beaucoup. Le film dure 2h14 et est en effet peut-être un tout petit trop long, mais je ne vois pas vraiment quoi enlever car il est très dense, très écrit, munitieusement maîtrisé, et chaque détail, chaque élément, chaque plan compte.

Il y a un grand nombre de détails de mise en scène qui régaleront les cinéphiles amateurs de technique, donc je ne les révèlerai pas ici ; néanmoins, ce n'est jamais gratuit ou tape à l'oeil. Bielinsky est un esthète sensible et inspiré et c'est devenu ô combien rare. Côté interprétation, on est également dans le haut de gamme, et l'acteur Ricardo Darín (déjà une des deux "vedettes" des Neuf Reines) confirme ici qu'il est un surdoué, ou plutôt, un acteur-né, tant la sensation de naturel qu'il dégage est éblouissante (notamment, la palette d'émotions qu'il sait faire passer dans ses yeux est assez stupéfiante). Sa filmographie reste injustement cantonnée à des films sud-américains qui ne sortent pas toujours de leur frontière, mais peut-être est-ce dû à une absence de maîtrise de la langue anglaise.

Le cinéma sud-américain, qu'il soit filmé en langue espagnole ou portuguaise, continue à nous offrir de sacrées belles surprises et Bielinsky vient - pour moi - de rejoindre pour de bon le club des très doués, aux côtés de Fernando Mereilles, Alfonso Cuarón, Carlos Sorin, Walter Salles, etc. Un film à voir pour les cinéphiles qui se sentent peut-être blasés de ne plus voir à la fois de la maîtrise et de l'originalité sur nos écrans.

9/10

11:30 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

27 mars 2006

Romanzo Criminale



On ne peut pas dire que ce film italien manque d'ambition, et c'est bien, car chez nous, en France, on en manque terriblement (cf. les critiques des films français vus précédemment). Le souci, c'est qu'on est en droit alors de le juger à la hauteur de cette prétention, car Romanzo Criminale ne s'affiche clairement pas comme un petit film de divertissement. Michele Placido a en effet vu grand : une fresque (ascencion, gloire, déclin), chapitrée, de 2h30, sur un gang de bandits décidés à contrôler Rome dans les années 70, les fameuses années de "plomb" où commencèrent à sévir les Brigades Rouges.

Le gros problème, c'est que Romanzo Criminale se prend les pieds dans le tapis en tentant de plaquer un polar dense sur un fond historique. Le contexte historique est tout juste saupoudré grâce à des images archives, maladroitement intégrées. Ce gros problème se retrouve dans le scénario, où les allusions aux Brigades Rouges ne sont qu'effleurées, sous-entendues, non pas subtiles, mais confuses. On nous laisse soupçonner un vague lien entre les terroristes des Brigades, l'Etat, les services secrets, la Mafia et le gang, mais qui manipule qui ? Pas de réponses, ce qui en soi n'est pas grave, un bon mystère étant souvent plus satisfaisant. Mais ici, tout est trop vite esquissé, trop brouillon pour que l'on puisse imaginer quoi que ce soit. Or, c'était là que le film avait une grosse carte à jouer.

Reste alors uniquement l'aspect polar froid et assez brutal, mais que les 2h30 du film sont alors longues ! Car de ce côté, pas grand-chose d'original à glaner (la pute autour de qui tourne ce microcosme ; le commissaire ambitieux et pas si net que ça ; le gang qui va pourrir de l'intérieur, chacun voulant doubler l'autre...). Il y a trop de personnages, aucun ne bénéficiant d'une psychologie assez approfondie pour qu'on s'attache un peu à eux. Ce manque de densité, d'envergure des personnages est clairement ce qui différencie ce polar d'une oeuvre de Scorsese, pour lâcher l'influence la plus évidente.

C'est dommage car s'il y a une chose qu'on ne peut pas reprocher au film, c'est l'excellence du jeu des acteurs, et c'est agréable de découvrir autant de têtes talentueuses à peu près inconnues chez nous (en dehors de la française Anna Mouglalis). Le film est donc porté par eux, et c'est déjà pas mal, mais insuffisant pour atteindre l'objectif affiché.

6/10

09:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Cinéma

24 mars 2006

Destination Finale 3



Ce troisième volet de la saga n'est ni vraiment meilleur, ni vraiment moins bon que les deux précédents. Avec Destination Finale, on n'est pas pris en traître : on sait à quoi s'attendre, et on obtient ni plus, ni moins. C'est typiquement le genre de films au plaisir coupable, pour lesquels on laisse son cerveau à l'entrée de la salle, un peu comme lorsqu'on se rend dans une fête foraine ou dans un parc d'attraction. Le but est de prendre du bon temps, sans aucune préoccupation culturelle.

La Mort a un plan : elle sait qui elle va prendre, quand et comment. Cependant, si d'aventure un humain avec des facultés un peu hors normes a des "visions", ou des prémonitions, certaines personnes peuvent échapper à une catastrophe prévue par la Grande Faucheuse. Ceci n'est pas acceptable ; les survivants constituent alors une anomalie, un bug, bref une situation qu'il faut réparer dès que possible. La Mort va donc s'acharner pour supprimer ces rescapés, et pour servir ce but, tous les moyens sont bons !

Ce pitch de base de la saga aurait pu vite tourner au ridicule si la Mort était personnifiée à l'écran, mais justement, non. La Mort ne s'incarne qu'à travers l'enchaînement malencontreux de "hasards", de circonstances qui vont aboutir à des mises en scène de morts si possible gore, fun et stressantes tout à la fois pour le spectateur.

L'intérêt de Destination Finale est dès lors son humoir noir, bien macabre et souvent méchant, où l'on assiste à un massacre progressif d'adolescents américains balayant tous les codes des comédies pour teenagers (les dindes style Paris Hilton, le reclus sur lui-même fan de Marylin Manson, le gros balèze qui ne pense qu'au sport, le frimeur obsédé, etc., tous joués avec le talent minimum pour les rendre crédibles)

Ce jeu de massacre fonctionne au final non seulement grâce à un scénario habile (certaines morts sont des petits chefs-d'oeuvre d'inventivité, et les fausses pistes sont légion), mais aussi grâce à une réalisation solide, souvent très technique : ceux qui ont vu Destination Finale 2 savent que la séquence d'ouverture de l'accident sur l'autoroute reste depuis comme une référence du cinéma catastrophe.

L'équivalent, dans Destination Finale 3, est la séquence se passant dans le grand huit de la fête foraine (cf. l'affiche du film). Avouons qu'elle est loin d'égaler son homologue de l'épisode précédent, alors qu'il y avait matière à la rendre encore plus horrible. C'est donc une occasion un peu manquée, car on peut mieux s'identifier au stress des passagers, puisque faire un tour de manège infernal est moins banal que prendre sa voiture (qui n'a jamais pensé à la possibilité d'un accident avant de monter dans un grand huit, qui est pourtant bien plus sûr qu'une autoroute ?).

Ce n'est pas grave, ça reste de bonne facture et la suite de Destination Finale 3 renoue sans problème avec les situations machiavéliques et grand-guignolesques qui provoquent à coup sûr exclamations d'effroi et rires dans la salle.

Vu le succès aux USA, on peut parier qu'il y aura un quatrème épisode. Vu l'inspiration a priori sans fin des scénaristes, on peut penser que la seule limite sera éventuellement la lassitude des spectateurs.

A lire : un classement rigolo, selon plusieurs critères, des meilleures morts des trois épisodes, par le site EcranLarge.com

7/10

16:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Cinéma

20 mars 2006

Renaissance



Renaissance propose la première utilisation convaincante du motion capture pour un film d'animation (après le très laid The Polar Express en 2003 de Robert Zemeckis). L'expression des visages et la fluidité des mouvements sont impressionnantes et sont mises au service d'un noir et blanc façon comic de Frank Miller. Oser un tel spectacle en France constitue indéniablement une rupture, peut-être un déclic (espérons-le).

Le scénario basé autour d'un techno-thriller d'espionnage est plutôt convenu et sans surprise, on devine facilement les dessous de l'intrigue. Peut-être par timidité, le choc visuel étant déjà à encaisser. Les personnages ne sont pas très développés, mais l'essentiel est ailleurs : Paris 2054 est le point de gravité du film. La vision poétique, fantasmée et futuriste de la capitale vaut à elle seule le détour, avec nombre d'idées que je n'énumérerai pas car la surprise vaut vraiment le coup.

J'ai noté aussi des idées de réalisation très intéressantes, car tirant parti des possibilités de l'animation, en effectuant des plans et des mouvements impossibles à réaliser avec des caméras. Nombre de transitions sont très soignées et fort habiles. Espérons qu'un tel bel objet connaîtra un succès minimum apte à en faire naître d'autres, avec cette fois, qui sait, une histoire plus originale afin d'allier niveau de la forme avec celui du fond.

7/10

13:50 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Cinéma

Du jour au lendemain



Philippe Le Guay m'avait laissé un bon souvenir avec la comédie dramatique Le Coût de la Vie (2003), film choral sociologique sur l'argent. Hélas, Du jour au lendemain n'a cette fois rien à dire car son scénario est cousu de fil blanc. Le film ne fait que poser la question "est-on finalement fait pour être heureux, tout le temps ?". Pour apprécier les bons moments, il faut en effet en passer par de mauvais. Grande découverte !

La substance du film étant réduite à néant (avec quelques moments drôles, à peine), il ne reste que les jeux d'acteurs, et les inconditionnels de Benoît Poelvoorde seront vraiment servis car le Belge se libre ici à un excellent numéro, encore une fois différent de ce qu'il a fait jusqu'à présent. Dire qu'il porte le film sur ses épaules n'est pas un euphémisme.

5/10

13:25 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma