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30 avril 2007

Anna M.



Réalisateur et scénariste, Michel Spinosa (dont je n'ai vu aucun des films précédents) s'est attaqué à la pathologie amoureuse qu'est l'érotomanie. Pour donner vie à cette jeune femme très perturbée qu'est Anna M., il fallait donc une actrice solide et bluffante, de la trempe d'une Isabelle Huppert. C'est une autre Isabelle (Carré) qui s'y est attelé, et sa composition physique et psychologique est impressionnante.

Trop, peut-être, au point que Spinosa a terriblement déséquilibré son film en se concentrant tellement sur Anna M., qu'il en a oublié de donner un peu d'épaisseur au personnage du médecin aimé (et harcelé), incarné par le grand Gilbert Melki. Dommage, car l'émotion est un peu absente ; par contre, le frisson est bien là.

Comme l'a très bien écrit Libération au sujet de ce film : "le comique d'une situation peut se briser en quelques secondes et laisser apparaître l'imminence d'un danger mortel ou la tragédie d'un isolement programmé". A tel point que certaines scènes peuvent réellement crisper ou heurter certaines âmes sensibles. Sans atteindre le niveau glaçant d'un Michael Haneke, Spinosa a donc réussi un film plutôt rare dans le paysage français.

Il est regrettable qu'il n'ait pas su terminer son film au moment opportun, celui-ci étant trop long d'un bon quart d'heure. La scène de la gare était une fin parfaite, dommage qu'il ait fallu continuer sur un dernier volet proprement inutile.

7/10

11:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

14 avril 2007

Sunshine



Danny Boyle est un de mes réalisateurs anglais préférés. Grand metteur en scène, il n'écrit pas ses scénarios lui-même, mais il les choisit avec soin en privilégiant ceux qui confrontent l'homme à ses pires défauts et à des choix nécessaires (seule exception et seul échec artistique de sa filmographie: A Life Less Ordinary, 1997). Il en résulte toujours une forte personnalité à l'écran, et les films de Boyle ne sont donc pas du goût de tout le monde ; même les succès publics comme Trainspotting ou 28 Days Later ont laissé sur le carreau bon nombre de spectateurs, car un peu trop "radicaux". Il faut dire que l'image de notre société renvoyée par le miroir que sont ses films n'est pas forcément flatteuse. C'est notamment une grande partie de la raison pour laquelle son film The Beach, en 2000, a été massacré, victime de la surexposition dûe à la présence de Lenoardo Di Caprio (dont c'était la première réapparition au cinéma après Titanic, et l'acteur faisait alors l'objet d'une dévotion sans limite, ce qui a attiré un nombre insensé de spectateurs à aller voir The Beach, film au message dérangeant).

Après l'intéressante mais relativement inoffensive fable qu'était son précédent film Millions (comme une pause dans sa carrière, après le brutal et décapant 28 Days Later), Danny Boyle était attendu au tournant avec Sunshine, qui étrenne un nouveau chapitre pour lui (il aime changer radicalement de genre à chacun de ses films), car il s'agit cette fois de science-fiction, genre ô combien périlleux qui a produit ces 20 dernières années plus de blockbusters pop-corn/cola que de films de la trempe de 2001, Solaris ou Alien.

Heureusement, comme les trois exemples pré-cités, la science-fiction n'est ici qu'un prétexte pour explorer des thèmes plus profonds. Malgré un pitch terriblement hollywoodien (en 2057, le Soleil se meurt, entraînant dans son déclin l'extinction de l'espèce humaine ; une équipe d'astronautes et de scientifiques part faire exploser l'intégralité des charges nucléaires fissibles de la Terre à la surface du Soleil pour relancer son activité), Sunshine est bien loin d'un Armageddon. Ne négligeant cependant pas des scènes d'action/catastrophe fortement anxiogènes, l'intérêt premier de Sunshine est sa réflexion sur notre place dans l'Univers. On pourra trouver ça mièvre, mais approcher le Soleil pour tenter de le faire revivre, c'est comme approcher Dieu. Dans leur mission promothéenne, les personnages sont confrontés à la démesure de leur responsabilité, et à leur nécessaire sacrifice. Et le film évite totalement le pathos, mais sait donner une forte dimension dramatique aux situations délicates.

Bien que je sois indifférent habituellement aux effets spéciaux, il faut avouer qu'ici, ils ont une importance capitale, aussi bien visuels que sonores. Comment faire passer la sensation de ce qui est par nature hors d'atteinte de notre expérience, à savoir le face-à-face avec le Soleil, et ses conséquences thermiques et magnétiques sur les objets et sur les hommes quand on en est aussi proche ? Les solutions créées par Danny Boyle et son équipe sont de toute beauté et franchement fascinantes, et servent parfaitement la nature métaphysique du film.

Alors, superbe réussite ? Presque ! Le film souffre hélas d'un terrible travers dans son scénario, lorsque celui-ci nous distille une absurdité confondante que je ne révèlerai pas ici, mais qui déséquilibre fortement le film vers un rebondissement digne d'un très grand navet hollywoodien, justement. Hormis cette impardonnable faute de goût, il est vrai que le Danny Boyle 2007 confirme son talent à toucher à tout, avec bonheur. Même la musique, proposée par le groupe électro Underworld (avec qui Danny Boyle a déjà travaillé, notamment sur Trainspotting avec le hit Born Slippy), est superbe. Le compositeur John Murphy, qui complète cette bande originale, s'est néanmoins permis de ré-utiliser le splendide thème déjà utilisé sur Miami Vice (celui qui clôt le film et qui s'intitule Who Are You). On ne lui en veut pas tellement c'est beau... et adapté.

8/10

19:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Cinéma

10 avril 2007

Ségo et Sarko sont dans un bateau



Karl Zéro et Michel Royer remettent le couvert, 10 mois à peine après Dans la peau de Jacques Chirac, documentaire qui leur a valu le César 2007 de sa catégorie. Or, ce n'est nullement ce César qui leur a permis de se lancer dans cette nouvelle aventure, puisque Ségo et Sarko... a été terminé en janvier 2007 avec une mise en chantier plusieurs mois auparavant (en fait, avant même que Ségo soit désignée comme la candidate du PS). Par contre, le César permet aux deux compères de s'attaquer à un troisième documentaire, qui s'intitulera Being George W. Bush, mais nous verrons cela en 2008.

Réalisé beaucoup plus rapidement, Ségo et Sarko... est ouvertement, d'après ses créateurs, un documentaire bien plus périssable puisqu'il tire son intérêt principal de le visionner avant le premier (voire second ?) tour de la présidentielle 2007. Il ne s'agit ici nullement d'un réquisitoire en faveur d'un candidat plutôt qu'un autre, mais de l'aveu de Karl Zéro, de montrer aux spectateurs comment lui, Karl Zéro, a perçu la personnalité des candidats au fil des années pendant lesquelles il a été amené à les côtoyer pour Le Vrai Journal. Pour ce faire, Zéro se sert donc d'images d'archives, pour beaucoup connues, dénichées par Michel Royer, mais aussi d'un grand nombre de offs inédits, tirés de rencontres lors d'interviews pour Le Vrai Journal.

Le résultat ne se place donc en général pas du tout sur un plan idéologique, mais purement sur celui de la personnalité des candidats et de ce qui les motive au plus profond d'eux-mêmes. L'éclairage est très instructif, et il convient à chacun de se faire sa propre opinion et de juger si cela peut lui être d'une quelconque utilité pour l'élection. On ne peut néanmoins pas nier que Karl Zéro et Michel Royer proposent quelque chose de différent et au final nouveau sur ces candidats (dont aussi, Le Pen, Bayrou, Laguillier, etc.), ce qui n'est pas un mince exploit vu la couverture médiatique non idéologique de la présidentielle.

La sortie de ce documentaire a eu lieu d'abord en DVD, puis en salles 15 jours après, dans un nombre de salles très limité vu que les exploitants n'ont pas réellement cru qu'il était possible d'attirer des spectateurs sur un titre déjà disponible dans les bacs. Pour ma part, je suis très content d'être allé le voir en salle, ne serait-ce que pour l'agréable surprise de voir Karl Zéro et Michel Royer débarquer à l'improviste à la fin de la séance pour sonder le terrain lors du premier jour d'exploitation à Paris (au Publicis). Le débat et les explications qui s'ensuivirent fuirent fort instructifs (nombre des détails donnés ici en sont tirés).

7/10

09:30 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma

05 avril 2007

Norway Of Life



Norway Of Life, jeu de mot séduisant, n'est en fait pas le vrai titre de ce film norvégien. Den Brysomme Mannen, ce qui veut dire "l'homme gênant", est bien autre chose qu'une parodie du mode vie de nos amis du Nord.

Le pitch est aguichant : Andreas se retrouve dans une ville étrange. Il ignore comment il est arrivé là. On lui remet un emploi bien payé et pas pénible, un appartement somptueux et même une très belle femme. Très vite, il s'aperçoit pourtant qu'il y a quelque chose qui cloche. Ses collègues sont charmants mais totalement dépourvus de personnalité. L'alcool ne saoûle pas, les aliments n'ont pas de goût... Andreas va tenter d'échapper à ce positivisme écoeurant.

Norway Of Life se situe au carrefour de plusieurs styles : satire, fantastique, burlesque, thriller... Côté littérature, on pense inévitablement à George Orwell ou Ray Bradbury ; côté cinéma, à Terry Gilliam (Brazil), ou Vincenzo Natali (Cypher). Les teintes très froides rappellent d'ailleurs fortement le look de Cypher, bien qu'il n'y ait pas la même maestria visuelle de la part du réalisateur Jens Lien.

Le film est à la fois cauchemardesque, onirique et drôle ; il titille néanmoins notre paranoïa, ainsi que notre angoisse de la vie contemporaine urbaine. C'est donc une oeuvre décalée, conseillée à ceux qui cherchent quelque chose de foncièrement détonnant avec la médiocrité générale des sorties actuelles.

Néanmoins, malgré l'avalanche de récompenses qu'a récolté le film (vainqueur de l'édition 2007 du Festival du Film Fantastique de Gérardmer avec quatre récompenses : le Grand Prix, le Prix de la Critique Internationale, le Prix du Jury Jeunes et Prix du Jury Sci Fi ; razzia aux Amanda Awards - l'équivalent norvégien de nos César : Meilleur acteur, Meilleur réalisateur et Meilleur scénario), le film pèche à mon goût par froideur excessive, ce qui est un comble vu que le film dénonce - entre autres - une certaine lobotimisation de nos modes de vie, qui anesthésie tout ce qui fait le charme de notre existence. Il manque au final une dimension poétique à ce film, qui n'en demeure pas moins un beau jalon dans une carrière à suivre.

7/10

16:32 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma