02 mai 2007
We Feed The World
Après le sidérant Notre pain quotidien, voici un nouveau documentaire sur les dessous de la fabrication des aliments et d'une agriculture industrialisée.
We feed the world n'est pas aussi nécessaire que Notre pain quotidien, mais il en constitue un utile complément. Même si ici, il y a pas non plus de voix-off, le documentaire n'est pas cette fois dépourvu de tout commentaire, et les plans sont beaucoup moins étudiés. Malgré cela, on n'assiste pas à documentaire banal.
Par contre, We feed the world n'atteint pas la puissance de Notre pain quotidien, tout simplement parce que ce dernier n'est pas résumable (sa puissance visuelle étant indicible), tandis que ce documentaire-ci peut se résumer à diverses aberrations révoltantes qu'il dévoile.
- Chaque jour à Vienne, la quantité de pain inutilisée, et vouée à la destruction, pourrait nourrir la seconde plus grande ville d'Autriche, Graz ;
- Environ 350 000 hectares de terres agricoles, essentiellement en Amérique latine, sont employés à la culture du soja destiné à la nourriture du cheptel des pays européens alors que près d'un quart de la population de ces pays souffre de malnutrition chronique, et que par le même temps des quantités absurdes de maïs et de blé sont cultivées en Europe pour être brûlées ;
- Chaque Européen consomme annuellement 10 kilogrammes de légumes verts, irrigués artificiellement dans le Sud de l'Espagne, et dont la culture provoque des pénuries d'eau locales...
Arrêtons-là la liste ; le plus révoltant est peut-être finalement le cynisme absolu du PDG de Nestlé (plus grand groupe industriel alimentaire du monde), un Autrichien qui nous fait calmement la "démonstration" que l'accès à l'eau ne peut pas être considéré comme un droit, et que l'eau doit nécessairement avoir une valeur marchande. Glaçant.
7/10
23:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma
01 mai 2007
Très bien, merci
Emmanuelle Cuau n'avait plus rien filmé pour le cinéma depuis 1995. Le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle a réussi un retour fort original. A partir d'un pitch kafkaïen, elle tresse un canevas à la fois social et politique, qui ne laisse jamais deviner sur quelle route il va nous emmener.
Tout part d'une scène terrifiante où Alex (Gilbert Melki, grand, très grand), un comptable sans histoire, assiste à un arbitraire contrôle d'identité de la part d'une patrouille de police. La police lui demande de partir, or Alex estime avoir le droit de rester sur le trottoir. Le ton de la police monte, Alex reste poli et vouvoie, tandis que les flics finissent par le tutoyer et l'injurier. Finalement, c'est Alex qui se retrouve au poste, et la grande machine à absurdité se met en marche : Alex voulant porter plainte à la fin de sa garde à vue, il est conduit à l'hôpital, qui l'interne en hôpital psychiatrique, ce qui va lui faire perdre son boulot.
Cette mésaventure est d'autant plus effrayante qu'elle est totalement crédible puisque tout ce qu'on voit à l'écran est l'oeuvre de machines judiciaires et administratives dans leur bon droit. La performance de Gilbert Melki est de donner vie à ce personnage ambivalent d'Alex, qui va finalement se laisser couler dans ce cours implacable des événements, tant il est impossible de lutter.
Les situations sont tour à tour (ou simultanément) drôles et angoissantes, selon l'humeur du spectateur. La grande qualité d'écriture, de mise en scène et d'interprétation tient à cet équilibre ténu, surprenant et déstabilisant.
Très bien, merci est un film très surprenant dans le paysage du cinéma français. Il souffre peut-être juste d'un manque de rythme. En dehors de ça, il bouleverse les conventions bien établies, ce qui peut décontenancer pas mal de spectateurs (moi le premier !). A voir au moins pour le jeu de Gilbert Melki, et pour la critique à peine voilée du tout-répressif policier de Sarkozy.
8/10
20:01 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma