31 octobre 2006
La Californie
Un film avec Nathalie Baye et Roschdy Zem, ça ne se rate pas. Problème : même si la performance des acteurs est au plus haut niveau, et que les qualités techniques du film sont évidentes, le développement de l'histoire est d'un grand ennui (et pourtant, j'aime souvent les cinéastes qui filment l'ennui, comme Sofia Coppola). Mais là, non, pas possible.
Comme le film ne m'a pas donné du tout envie de développer je livre paresseusement un lien vers la critique de Chronic'Art, qui explique assez bien, hélas, le naufrage.
5/10
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29 octobre 2006
The Queen
Stephen Frears did it again ! Après deux dernières oeuvres bluffantes (Dirty Pretty Things et Mrs Henderson Presents), j'avoue que The Queen, vu son sujet casse-gueule, la difficulté a priori d'être convaincu par des acteurs au physique pas forcément très ressemblant à des personnalités archi-connues, ainsi que sa fade bande-annonce, me faisaient un peu douter de la capacité du Britannique à continuer sur une telle lancée.
Or, la brillante intelligence de propos et de mise en scène de Frears éclate une fois de plus tout au long de ce drame mettant en lumière les conséquences du tragique décès de la princesse Diana sur la famille royale et la politique menée par Elizabeth II.
Nul sensationnalisme ici, la polémique autour de la mort de Diana n'est même pas évoquée, à peine suggérée. Le film se situe en permanence entre réserve pudique (exemple : hallucinante scène ou le prince Charles pénètre pour la première fois dans la chambre d'hôpital de la défunte, moment de mise en scène à méditer dans les écoles de cinéma !), et lumière crue sur les arcanes du pouvoir monarchique et constitutionnel. Le tout, arrosé en permanence d'un humour british froid et bien cinglant, d'un à-propos fort rare.
En quelques secondes, on comprend qu'Helen Mirren, qui interprète Elizabeth II, a gagné la partie. Sa prestation, d'un naturel inouï, emporte en un clin d'oeil les quelques réticences qu'on pouvait avoir avec l'éventuel manque de ressemblance physique entre les acteurs et les personnalités interprétées. Sa coupe de la meilleure interprétation féminine remportée cette année à Venise est plus que logique, c'était un dû. Les autres acteurs ne déméritent pas, et on reconnaît au passage l'extraordinaire faculté de direction d'acteurs que possède Stephen Frears.
Il en va de même pour le scénario de Peter Morgan, reparti lui aussi de la plus haute récompense à Venise. Les répliques, la foule de précisions, l'alternance des points de vue : cette maestria magnétise littéralement le spectateur. La fiction devient alors tellement plus intéressante que la réalité dépeinte dans les journaux... Réflexion sur le pouvoir, sur la solitude aussi, analyse (et comédie) de moeurs, décryptage politique, The Queen allie virtuosité à tous les étages (mise en scène, montage, photographie, interprétation décors, scénario, etc.), pour un résultat purement jouissif qui consacre définitivement Stephen Frears comme probablement le meilleur réalisateur britannique en activité.
10/10
19:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3)
28 octobre 2006
Flags of Our Fathers
Après deux drames du calibre de Mystic River et Million Dollar Baby, succès publics et critiques que l'on sait, on pourrait dire que la cote du père Eastwood n'a jamais été aussi haute (en tant que réalisateur). Alors même à 76 ans, sans avoir plus rien à prouver depuis très longtemps, on se prend à attendre de l'artiste toujours plus. Et de toute façon, même si l'homme vieillit, Eastwood reste auréolé de sa propre légende ; on attendra toujours de lui bien plus qu'un cinéaste américain lambda genre Ron Howard...
A cette aune, et à cette aune là uniquement, Flags of Our Fathers est décevant, tout simplement parce que personnellement, je n'y retrouve pas la maîtrise absolue à laquelle Eastwood nous a habitués, et ce sur plusieurs postes.
Le plus décevant, pour moi, est d'un point de vue de la forme : la mise en scène ne permet pas, sur le champ de bataille de sentir quelque stratégie que ce soit ; on ne mesure pas l'avancement des soldats, on voit juste une boucherie (et encore, bien gentille comparée à celle de Saving Private Ryan). C'est néanmoins sans doute l'intention du réalisateur, puisque les nombreux flashes-back ont pour but de montrer les atrocités qui hantent les soldats. Ce choix de montage (rapidement prévisible et agaçant, pour moi), rend l'action encore plus confuse. Ces scènes se passant sur l'île sentent en outre trop souvent le numérique, et d'autres paraissent factices (les scènes de nuit, avec l'éclairage très années 80, font regretter amèrement que des caméras numériques ne prennent pas le relais, et que l'exemple de Michael Mann et de ses expérimentations en la matière ne fassent pas encore d'autres émules).
Le sujet principal du flm reste évidemment l'histoire des marines Gagnon et Hayes, et de l'infirmier Bradley, les trois survivants censés apparaître sur le fameux cliché, rapatriés dans leur pays pour contribuer à accélérer la vente de bons de souscription, grâce à leur statut de héros. Cette partie du film, sur laquelle je pensais Eastwood capable du meilleur, est pour moi la plus ennuyeuse, faute d'interprètes de grande envergure (seul Adam Beach, jouant l'Indien Ira Hayes, offre une performance moins lisse), de messages rabachés et maladroits. La seule véritable émotion du film, c'est le générique du fin qui la procure. Le reste ressemble finalement à du cinéma américain "machine à moissonner de l'oscar", avec un côté fabriqué et lisse très surprenant pour du Eastwood.
Reste que ce film ne pourra être réellement apprécié qu'après avoir vu la deuxième partie, à savoir Letters from Iwo Jima, à sortir début 2007, puisque ce film (tourné en langue japonaise) relatera la prise de l'île d'Iwo Jima du point de vue des Japonais. Cette démarche, parfaitement admirable de la part d'Eastwood, suscite (du moins pour ma part) de grands espoirs, paradoxalement renforcés après cette déception.
6/10
22:29 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2)
La Citadelle assiégée
La Citadelle assiégée est un docu-fiction animalier, conçu comme un véritable film catastrophe. Il met aux prises d’un côté les termites, et de l’autre, les fourmis magnans, insectes aux mandibules acérées, guerrières agressives, créatures qui semblent tout droit sorties d’un film d’épouvante.
La reine des termites semble quant à elle tout droit sortie d'un film de science-fiction, et c'est là qu'on voit que la réalité dépasse en fait la fiction : les insectes monstrueux de films comme Starship Troopers (du grand Paul Verhoeven) s'appuient justement totalement sur des observations entomologiques. Sauf que là, pour la première fois, on peut découvrir avec une précision insensée (et avec effroi !) ce qui se passe dans les tréfonds d'une termitière de plusieurs mètres de haut, jusqu'à la chambre royale, l'endroit le mieux protégé.
Ceci est possible grâce au boroscope, outil révolutionnaire dans l'image macroscopique. Jusqu'à présent, tous les objectifs macro avaient une profondeur de champs très réduite. Avec le boroscope, l'objectif est installé à quelques centimètres de l'animal. Il confère un angle de 120 degrés avec une mise au point très près du sujet, ce qui permet d'avoir une image nette de 5 cm à l'infini. Les insectes paraissent énormes et donnent l'impression d'évoluer dans un grand canyon alors qu'ils courent dans une crevasse de quelques centimètres de large. Autre point fort du boroscope : avoir sa première lentille très éloignée du plan focal. Sur un simple panoramique, l'image donne l'impression d'avoir été tournée à la grue. On est donc très loin des images un peu statiques ou sans relief des documentaires animaliers.
Les prises de vue à couper le souffle, ainsi que la scénarisation des rushes, permettent donc d'être captivé bien au-delà de ce que proposent habituellement les documentaires habituels. Néanmoins, ce film tombe presque dans l'excès inverse, c'est-à-dire que j'aurais aimé comprendre par moment la cause de tel ou tel événement/comportement ; la voix-off ne fait souvent que surligner ce qu'on voit à l'écran, sans explication détaillée. A voir par curiosité néanmoins !
7/10
21:50 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0)
21 octobre 2006
Children of Men
N'y allons pas par quatre chemins : le mexicain Alfonso Cuarón confirme tous les espoirs suscités avec ses films précédents (entre autres, Y tu mamá también, et Harry Potter and the Prisoner of Azkaban, seul épisode des Harry Potter à bénéficier d'une vraie identité cinématographique et d'une noirceur qui le rend plus destiné aux adultes qu'aux enfants), et livre avec son 6e film une oeuvre formellement parfaite. Il rejoint son compatriote Alejandro González Iñárritu dans le rang des réalisateurs à la virtuosité intouchable.
Children of Men (littéralement Les fils des hommes, et non pas Les fils de l'homme comme le laisse entendre le titre français, qui reproduit le même étrange couac de traduction qu'avec Star Wars), sous sa forme de thriller d'anticipation, est une oeuvre d'une richesse de réflexion essentielle et nécessaire. Il ne faut pas en passer à côté, malgré son titre peu amène et son affiche complètement ratée.
Le scénario est adapté (par Cuarón lui-même) du seul roman de P.D. James à ne pas être un polar ; l'action se situe en 2027, plus aucune femme n'est apte à procréer et la dernière naissance remonte à plus de 18 ans. Le désespoir a engendré à travers le monde un climat de violence, d’anarchisme et de nihilisme exacerbé. La Grande-Bretagne est le seul pays à avoir évité cette descente aux enfers, en se dotant d’un régime totalitaire. Devenue l’ultime espoir d’une humanité déboussolée, elle attire malgré elle des milliers de réfugiés. L'une d'entre eux va s'avérer être enceinte, miracle hélas pris entre intérêts divergents et qui va déclencher une course effrénée pour sa survie, seul espoir d'une issue pour l'humanité.
La véritable intelligence du scénario, c'est de proposer une action proche de nous : 2027, c'est demain. A l'écran cela se transpose par de subtiles modifications qui font qu'on y croit dès le départ. Ce n'est pas de la science-fiction, juste une vingtaine d'années d'anticipation, et c'est très faisable. Quasiment pas d'effets spéciaux, tout est dans des trouvailles de décor. En fait, se sachant condamnée, l'humanité est plus proche de la régression et de la déliquescence que de la modernité. Cuarón amplifie tous les maux qui grèvent déjà la Terre de nos jours : une pollution galopante (ici exacerbée par le fait que l'humanité n'a plus à se soucier de léguer un environnement vivable pour les générations futures) ; des camps de détention ressemblant furieusement à Guantanamo, mais en pire ; des actes terrotistes quotidiens (renvoyant à ceux de l'Irak), etc.
Cuarón ne s'attache pas au pourquoi ni au comment (extrême intelligence que de ne jamais s'intéresser au pourquoi de cette impossibilité de procréer), il exploite à 100% les conséquences de la situation et via une fuite en avant, croque une fable ultra-pessimiste de nos sociétés occidentales (mais non totalement dénuée d'humour, nous permettant ainsi à de très brefs instants de respirer), sur fond d'action menée de main de maître. Le film est un véritable étau dont plusieurs scènes-chocs ne sont vraiment pas à mettre devant tous les yeux. Seul un symbolisme un peu lourd peut gêner, sans doute, certains spectateurs. On est heureusement très loin de la lourdeur appuyée de V For Vendetta de ce point de vue là.
D'un point de vue technique, le film a été récompensé à Venise cette année et on comprend pourquoi. Cuarón nous livre un lot de plan-séquences d'une virtuosité étourdissante, avec très peu de gros plans, nous plaçant ainsi au coeur de l'action. La rigueur de la composition du cadre n'a d'égale celle de la photographie, assurée par son fidèle complice Emmanuel Lubezki, débauché à plusieurs reprises par deux autres frappa-dingues de l'image, Michael Mann (pour Ali), et Terrence Malick (pour The Thin Red Line et The New World), excusez du peu.
Même la bande-son est à chialer, entre des extraits parfaitement opportuns des Rolling Stones (Ruby Tuesday), de King Crimson (apothéose de moment contemplatif), de John Lennon, Deep Purple ou encore Radiohead.
Pour finir, je ne peux que vous conseiller de lire ce dossier consacré à Alfonso Cuarón, écrit en 2004 mais qui analyse superbement le style de ce génie esthétique, et qui prouve avec Children of Men qu'il a beaucoup de choses de fond à dire.
10/10
19:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4)