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28 novembre 2008

Two Lovers



Après un We Own The Night totalement emballant sorti l'an dernier, James Gray a tourné son quatrième film très rapidement, lui qui n'avait sorti précédemment que trois films depuis 1994 (mais des films d'envergure, certes). James Gray n'est pas un auteur lent, c'est qu'il ne lâche pas une idée tant qu'il n'a pas pu la réaliser, et parfois cela prend beaucoup de temps avec les producteurs. Sauf pour Two Lovers.

Visiblement, le fait d'avoir pu tourner vite et d'avoir laissé de côté pour la première fois les codes du polar n'a entamé en rien son talent. Two Lovers, sous des aspects de comédie romantique inoffensive (pitch rebattu, affiche trompeuse), est en fait une tragédie intense, sans le côté très shakespearien de The Yards ou We Own The Night, mais avec une même noirceur.

Un homme (Joaquin Phoenix), adulte paumé qui vite encore chez ses parents à 35 ans, voit son avenir bouleversé par l'arrivée d'une charmante mais perturbée voisine (Gwyneth Paltrow), alors que ses parents ont arrangé son union avec la fille (Vinessa Shaw) de l'entrepreneur qui rachète leur pressing, situé à Brighton Beach (le quartier juif russe de New York où James Gray a grandi et déjà situé l'action de ses deux premiers films). Les personnages, pas plus que le lieu, ne sont guère glamour ; même si les acteurs sont très beaux, ils sont ici employés à contre-emploi total. Chez Gray, ils deviennent des individus lambda, paumés, maladroits, malades sentimentaux. Leurs relations sont imprévisibles et surprenantes.

Gray fait éclater les poncifs du mélo en tirant son film vers une étrangeté latente, sublimée par une photographie impressionniste à tomber. Le plus remarquable reste peut-être la direction d'acteurs. On est affaire à du très, très haut niveau et Joaquin Phoenix crève une fois de plus l'écran, avec un rôle très complexe et foncièrement original. Même les seconds rôles sont haut de gamme, avec Isabella Rossellini par exemple.

Les scènes d'anthologie sont légion dans Two Lovers. Difficile même d'en choisir pour les citer. Il y a bien la scène de la discothèque (celle de We Own The Night était déjà un moment de lévitation absolue), ou encore celles des moments de vérité sur le toit de l'immeuble. Il y a les référencées, comme les échanges et surveillances mutuelles de Phoenix et de Paltrow au travers de leurs fenêtres d'appartements (Fenêtre sur cour est un des deux films préférés de Gray). Mais tout confine au chef d'œuvre dans Two Lovers. En tout cas, cela en dit long sur le festival de Cannes quand on voit que ni We Own The Night, ni Two Lovers (présents en compétition officielle en 2007 et 2008) sont repartis bredouilles.

9/10

05 décembre 2007

We Own The Night



James Gray est un cinéaste rare : trois films seulement depuis 1994. A l'âge de 25 ans, il écrit et tourne Little Odessa en 1994 et obtient le Lion d'Argent à Venise, tout comme le prix de la Critique du Festival de Deauville. Ce film très sombre, avec Edward Furlong et Tim Roth, se passe à Brighton Beach, une zone de New-York City rarement dépeinte au cinéma, dans le quartier de la mafia juive russe appelée Little Odessa. James Gray passe immédiatement pour un surdoué très prometteur.

Pour The Yards, en 2000, il embauche Mark Wahlberg et Joaquin Phoenix, qu'il convoque à nouveau en 2006 pour le tournage de We Own The Night (devis de la brigade des stups à NYC dans les 80's). Encore une fois, c'est à Brighton Beach que l'action se situe, et encore une fois l'ombre de la mafia russe plane sur le film. Et encore une fois, James Gray évite les clichés sur NYC, en tournant dans des quartiers qu'on ne voit jamais dans les films. Pas de redite avec Little Odessa néanmoins. We Own The Night explore l'histoire de Bobby (peut-être bien le rôle de sa vie pour Joaquin Phoenix, sidérant), patron d'une boite de nuit branchée appartenant à des Russes qui étendent leur influence grâce au trafic de drogue. Pour continuer son ascension, Bobby doit cacher ses liens avec sa famille : seule sa petite amie (Eva Mendes), Amada est au courant que son frère, Joseph (Mark Wahlberg), et son père, Burt (Robert Duvall), sont des membres éminents de la police new-yorkaise...

L'histoire a l'air classique. Elle l'est, mais écrite par James Gray, ce policier est nettement plus proche d'un drame quasiment shakespearien comme Heat de Michael Mann. Si Little Odessa ne m'avait pas spécialement impressionné à cause de son scénario, il faut avouer qu'avec We Own The Night, James Gray a hissé son cinéma à un niveau proche de celui de celui de Michael Mann (sans toutefois jamais le copier d'un point de vue du style). Comme dans Miami Vice, le film commence sans générique d'introduction sur une fantastique scène dans une boîte de nuit. Sur "Heart Of Glass" de Blondie, le couple Phoenix/Mendes nous est présenté. Il brûle l'écran. A partir de là, impossible de détourner son regard de cette tragédie vertigineuse. James Gray nous offre 1h50 de bonheur cinématographique, d'une énergie et d'une émotion tétanisantes. Il n'y a pas une séquence qui ne serve à moins de 100% le flux assez imprévisible de l'histoire.

Ce qui va rester probablement comme un des films majeurs de cette décennie a l'ironie de sortir moins d'un an après des films comme The Departed de Scorsese ou American Gangster de Ridley Scott, qui se donnaient des airs de grands classiques du polar, et qui y échouent totalement. James Gray, lui, avance avec plus de modestie, et rafle la mise. Le génie qu'on lui pressentait à ses débuts est bien là, mûr et avéré. Nous avons gagné un très grand. Vivement la suite !

10/10

09:59 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, James Gray