11 août 2010
Inception
L'Anglais Christopher Nolan continue son ascension d'Hollywood avec une maîtrise qu'on ne peut que saluer. Après le succès insensé de The Dark Knight en 2008 (succès public et critique d'une intensité rarissime), Nolan semble en position de pouvoir tout se permettre. Et c'est bien ce qu'il fait avec Inception, blockbuster qui semble trouver le point d'équilibre idéal entre divertissement estival et idées originales - presque alambiquées ! - a priori impossible à vendre à une major.
La relative complexité du postulat de base (voler ou immiscer des idées et des informations dans le cerveau en fabriquant des rêves sur mesure pour tromper les sujets) allonge la durée du film en raison d'une bonne demi-heure faisant office de "mode d'emploi", mais c'est un mal nécessaire pour apprécier la suite. Nolan a une approche totalement naturaliste du rêve, ce qui rend son long-métrage assez froid et peu poétique ; cette sensation est renforcée par les scènes d'action monstrueuses qui lorgnent du côté de Mission: Impossible ou James Bond (les derniers volets avec Daniel Craig), le tout sous imaginaire à la Matrix sans l'influence manga. On est donc bien dans un blockbuster, mais le talent de mise en scène de Nolan, et la beauté formelle de la photographie, offrent finalement un spectacle haut de gamme sur lequel il est difficile de faire la fine bouche.
Nolan n'a toutefois pas le talent de Michael Mann, par exemple, pour arriver à mêler action et émotions avec le même brio. Non seulement Nolan n'exploite donc pas du tout les pistes symboliques et oniriques que lui offrait son idée de base, mais de surcroît l'histoire d'amour entre Di Caprio et Cotillard est peu convaincante et a de toute évidence été brodée pour tenter d'apporter un contrepoint aux scènes d'action et au suspense lié à la réussite de la mission principale du héros (qui requiert un rêve dans un rêve dans un rêve... chaud !).
La réussite du film vient vraiment de sa capacité à nous faire avaler sans sourciller une histoire de science-fiction abracadabrante mais délicieusement haletante pour peu qu'on ne cherche pas trop à décortiquer ce qu'on nous explique (difficile de toute façon vu le rythme). Tout cela sans jamais prendre les spectateurs pour des bourrins décérébrés (on n'est évidemment pas dans la même catégorie que Transformers), et avec une virtuosité technique de tous les instants (trucages qui ne sont pas toujours des images de synthèse, fait très appréciable). Son deuxième long-métrage, Memento (totalement culte), paraît désormais bien loin, mais il est rassurant de voir que Nolan arrive encore, même avec de tels budgets, à insuffler des thématiques personnelles, plutôt joliment filées tout au long de sa filmographie. Voilà donc un un auteur-réalisateur-producteur qui a trouvé là un compromis pratiquement parfait entre plusieurs enjeux généralement antagonistes. L'histoire du cinéma n'en a pas connu beaucoup.
8/10
23:01 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, christopher nolan, leonardo dicaprio, marion cotillard, ellen page
01 février 2009
Revolutionary Road
Il est évident que l'ancien metteur en scène de théâtre Sam Mendes a réussi à ne pas vendre son âme au diable en se lançant dans le cinéma. Depuis 1999 et le succès planétaire d'American Beauty, cet Anglais a su sortir subtilement du cadre hollywoodien, sans en avoir l'air.
American Beauty restera sans doute une exception dans son œuvre, et en particulier parce qu'Alan Ball en est le scénariste ; il est à craindre pour Mendes que toute sa filmographie sera systématiquement comparée à son premier film.
Et c'est bien ce à quoi on ne peut résister pour parler de Revolutionary Road, car thématiquement, le film tisse un lien de parenté plus qu'évident avec American Beauty. Une nouvelle fois, le cadre de la banlieue résidentielle et proprette est convoqué pour en montrer l'étouffante aliénation qui peut conduire à la crise existentielle et à la mort.
Bien heureusement, Mendes ne raconte pas la même histoire pour autant, non seulement parce qu'il change d'époque, mais aussi parce que le scénario se resserre autour d'un couple, LE couple DiCaprio/Winslet (Kate Winslet étant Mme Mendes à la ville). La maturité acquise depuis Titanic permet de mesurer le chemin parcouru par ces deux acteurs, la maîtrise absolue revenant à Kate Winslet qui est époustouflante dans son rôle de femme au foyer complètement déchirée par ses idéaux.
Mendes a su faire de ce drame autre chose que les clichés qu'on pouvait en craindre, et il y a des leçons de mise en scène cinglantes. Techniquement, il navigue à mon avis dans les mêmes eaux que David Fincher, Paul Thomas Anderson, ou James Gray, à ceci près que Mendes est anglais, pas américain. Leurs films sont gages d'un moment de cinéma de qualité minimum. Des valeurs sûres, que chacun ordonnera selon sa sensibilité personnelle.
8/10
11:33 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, sam mendes, leonardo dicaprio, kate winslet