Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11 septembre 2007

4 mois, 3 semaines, 2 jours



Après plusieurs Palmes d'Or décevantes (palme-arnaque pour Fahrenheit 9/11 de Michael Moore en 2004, palme "par défaut" en 2005 pour L'Enfant des frères Dardenne, palme "hommage" et consensuelle pour Le Vent se lève de Ken Loach), Stephen Frears et son jury ont enfin relevé le niveau en attribuant en 2007 la récompense suprême au réalisateur roumain Cristian Mungiu, qui signe son deuxième long-métrage avec 4 Luni, 3 Saptamini Si 2 Zile.

Le film nous montre presque en temps réel la journée d'une jeune femme (l'actrice Anamaria Marinca, fabuleuse, qui joue dans le prochain Coppola) qui aide une amie à avorter dans la Roumanie de l'époque Ceausescu (1987). L'intelligence du film consiste à ne pas s'apesantir sur le contexte historique, qui reste toujours en arrière-plan, mais qui installe le film dans une ambiance de terreur. Avec un talent virtuose, Mungiu nous fait directement ressentir ce qu'il en coûtait de devoir vivre dans une dictature où le moindre fait et geste pouvait être épié.

L'avortement, qui était alors un crime à cette époque en Roumanie, représentait donc un risque énorme pour les femmes (dont 500 000 environ en sont mortes sous le régime Ceausescu). Mais Mungiu dépasse largement cette problématique (qui est plus un ressort dramatique, qui distille une tension de thriller), en s'attaquant au fond à la société roumaine où bon nombre d'individus balançaient entre lâcheté et exploitation odieuse de la situation.

Mungiu utilise principalement le plan-séquence, sous deux formes : le plan fixe et la caméra à l'épaule. Il en ressort bien entendu une grande impression de réalisme, voire de naturalisme. Les plans fixes sont ceux qui distillent le plus d'effroi (cf. la scène pivot du film de la négociation dans la chambre d'hôtel, où personne ne moufte dans la salle). Bouleversant, percutant, angoissant, le deuxième film de Cristian Mungiu est une réussite sur la forme et sur le fond, un uppercut qui fait mal longtemps après la fin de la projection. Rarement une Palme d'Or aura été aussi évidente et judicieuse. Il convient désormais d'attendre au tournant Cristian Mungiu pour son prochain film.

9/10