01 août 2008
Surveillance
Il n'y avait plus de nouvelles de Jennifer Lynch (oui, la fille de...) depuis 1993 et son premier long-métrage Boxing Helena très controversé en raison de sa perversité. Ayant tenu à élever sa fille seule suite à un divorce, Jennifer Lynch a mis pendant tout ce temps sa carrière de réalisatrice entre parenthèses. Cela ne l'a pas empêché de produire quelques films, et surtout de réfléchir à plusieurs projets de longs-métrages en préparant des scénarios (son troisième film est déjà en tournage cet été donc sa carrière semble bien repartir).
On aurait pu croire qu'une si longue absence derrière la caméra aurait pu empêcher tout progrès depuis son premier film. Il n'en est rien car le point fort de Surveillance est justement le brio de sa réalisation. Sur ce point, la fille de David Lynch partage, il faut l'avouer, certains points communs avec son père, et il n'y a là rien de honteux quand le talent est au rendez-vous. On notera en particulier la façon de mettre le spectateur en état d'hyper-réceptivité sensorielle, par l'acuité du cadrage, du montage, des fondus, des filtres et de l'utilisation redoutable de la bande-son (pas la musique ; les bruits d'ambiance). Si on ajoute le recours à des acteurs issus en partie du Lynchland (Bill Pullman dans Lost Highway, Julia Ormond dans Inland Empire), l'attachement à décrire les bizarreries des péquenots des Etats-Unis, le goût pour le tragi-comique... on aboutit à un cocktail qui nous plonge dans une ambiance lynchienne, si tant est que ce caractère soit héréditaire !
Mais la comparaison s'arrête là tout net car Surveillance, même s'il commence comme du Twin Peaks, dérive peu à peu vers la farce macabre des films les plus extrêmes des frères Coen, tout en restant grosso modo dans le style d'une série B, certes peu usuelle par ce qu'elle donne à voir de la nature humaine. C'est probablement dans les effets série B du scénario que se situent d'ailleurs les défauts et la limite de Surveillance, sur lesquels je ne peux pas m'étendre sous peine de spoiler. Son père, David Lynch, qui a produit le film, lui avait d'ailleurs supplié de changer la fin du film, ce qu'elle a refusé de faire, vraisemblablement à tort... Reste tout de même un film avec bien plus de qualités que de défauts et un retour d'une qualité tout de même assez inespérée pour une réalisatrice "fille de" qui peut sans aucun doute s'émanciper, comme semble le suggérer son prochain film, tourné à Bollywood (!).
7/10
23:18 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Cinéma, Jennifer Lynch, Bill Pullman, Julia Ormond